Au-delà du mental, le Témoin, puis au-delà, l'intensité infinie de la vacuité et du silence
par Shri Nisargadatta Maharaj
Source : Je Suis - Les Deux Océans - Paris
En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Quand la conscience est sans forme et ne se connaissant pas elle-même, elle est l'Absolu.
Nous sommes uniquement cette conscience. L'éternel est pour toujours, un état de non-expérience.
L'univers est contenu dans la conscience, et le corps physique lui aussi n'est qu'une apparition dans la conscience, perçue et reconnue par la conscience.
Ce qui EST, c'est cette conscience, en dehors de quoi rien ne peut exister.
Shri Nisargadatta Maharaj
Au niveau ultime la Présence est dissoute. Vous ne serez pas conscient quand la Présence devient Omniprésence.
Tout est Un. Il n'y a pas d'individualité.
Cette Présence spontanée, cette Présence invisible, est inconsciente de sa propre identité parce qu'elle est vaste, toute puissante, omniprésente, juste comme le ciel.
Shri Ramakant Maharaj
Si vous comprenez que ce corps n'existe pas, vous êtes libéré du tourment de la mort. Vous êtes en tout et en tout lieu car vous êtes la source de toute chose.
Comment pourriez-vous mourir ?
Comprenez que tout est Un, et tout se termine alors.
Ranjit Maharaj
Le Je suprême, non-manifesté, ne possède aucun savoir, il ne se connaît pas, il est totale êtreté. Cette êtreté est reflétée par la conscience, cette conscience a surgi du non-manifesté, sans cause, en créant le temps, l'espace et la matière, elle ne peut exister en l'absence du corps. Elle est la Conscience, il n'y en a qu'Une. Tout ce qui existe est je, tout ce qui existe est moi, mais le Je percevant cela s'est limité en s'identifiant à son support et a perdu cette compréhension. Pourtant, ce manifesté est identique au non-manifesté, à cette présence Absolue. Il n'y a pas de différence entre le Je non-manifesté et le monde. C'est pour cela que vous n'avez besoin d'aucun changement ni d'aucun appui, vous êtes cela. Il faut que votre esprit soit complètement au repos, alors il se dissoudra et il ne subsistera que la réalité.
S'immerger dans cette connaissance « je suis » est Bhagwan, splendeur. C'est une illumination éclairant comme la foudre. Vous êtes seulement lumière et de cette révélation le monde surgit. Ayant atteint ce stade, vous êtes le pur joyau du diadème, le diamant au sommet de la couronne. Mais ayant assimilé, pleinement éveillé, ce qu'est le monde, ce qu'est cette conscience, vous souhaitez vous en débarrasser. Vous découvrez que cette splendeur est le siège de toutes les erreurs, de tous les mensonges. Quand vous l'avez totalement compris, vous transcendez cet état. Ce n'est plus rien, c'est comme du mucus dans la gorge qui vous gêne, vous le crachez.
Shri Nisargadatta Maharaj
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est Existence, Conscience et Félicité (Sat-Chit-Ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Sri Siddharameshwar Maharaj
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Dans le Suprême apparaît le témoin. Le témoin crée la personne et la pense comme séparée de lui. Quand le témoin voit la personne apparaître dans la conscience qui elle-même apparaît dans le témoin, la réalisation de cette unité fondamentale est l'œuvre du Suprême. Il est la puissance derrière le témoin, la source d'où tout coule. On ne peut pas le contacter à moins qu'il n'y ait unité et amour, et une aide mutuelle entre la personne et le témoin, à moins qu'il n'y ait harmonie entre l'action, l'être et la connaissance. Le Suprême est à la fois la source et le fruit de cette harmonie. Pendant que je vous parle, je suis dans un état d’Éveil détaché mais affectueux (turiya). Quand cette Conscience se retourne sur elle-même, on peut l'appeler l’État Suprême (turyatita). Mais la Réalité fondamentale transcende la Conscience, transcende les trois états du devenir, de l'être et du non-être.
Il ne peut pas y avoir d'expérience en dehors de la Conscience. Il existe, cependant, l'expérience d'être, simplement. Il y a, au-delà de la Conscience, un état qui n'est pas inconscient. Certains le nomme Supra-conscience, Pure Conscience ou Conscience suprême. Il est Pur Éveil libéré du complexe sujet-objet.
M : Vous voilà de nouveau en Inde ! Où avez-vous été, qu'avez-vous vu ?
Q : Je viens de Suisse où j'ai vécu avec un homme remarquable qui dit s'être réalisé. Autrefois, il a fait beaucoup de yoga et il a eu de nombreuses expériences, aujourd'hui disparues. Il ne prétend pas avoir maintenant des dons ou une connaissance particulière ; la seule chose qui, chez lui, est inhabituelle est en relation avec les sens ; il est incapable de séparer le voyant du vu. Par exemple, quand il voit une voiture se précipiter sur lui, il ne sait pas si c'est une automobile qui se rue sur un homme ou un homme qui se rue sur une automobile. Il a l'impression d'être les deux à la fois. Le voyant et le vu sont devenus un. Dans tout ce qu'il voit, il se voit lui-même. Quand on lui pose des questions inspirées du védânta, il dit : « Sincèrement, je ne peux pas répondre, je ne sais pas ; tout ce que je connais, c'est cette étrange identité avec tout ce que je vois. Voyez-vous, je m'attendais à tout sauf à ça ». C'est, dans l'ensemble, un homme simple ; il ne fait pas de disciple et en aucune façon ne se met sur un piédestal. Il parle volontiers de sa bizarre condition, mais c'est tout.
M : Maintenant, il connaît ce qu'il connaît. Tout le reste est dépassé. Au moins, il parle encore. Bientôt, il peut s'arrêter de parler.
Q : Que fera-t-il alors ?
M : L'immobilité et le silence ne sont pas inactifs. La fleur remplit l'espace de son parfum, la chandelle de lumière. Ils ne font rien, cependant leur simple présence transforme toute chose. Vous pouvez photographier la chandelle, mais pas sa lumière. Vous pouvez connaître l'homme, son nom et son apparence, mais vous ne pouvez pas connaître son influence. Sa présence même est action.
Q : N'est-ce pas naturel d'être actif ?
M : Tout le monde veut agir mais où se trouve l'origine de l'acte ? Il n'y a pas de point central, chaque action en engendre une autre, péniblement et sans signification, dans une succession sans fin. L'alternance du travail et de la paix ne se trouve pas là.
Trouvez d'abord le centre immuable
où tout mouvement prend naissance.
De même qu'une roue tourne autour d'un trou vide, soyez toujours au centre et ne tournoyez pas à la périphérie.
Q : Comment puis-je mettre cela en pratique ?
M : Chaque fois que se manifeste dans votre mental une pensée ou une émotion provoquées par le désir ou la peur, détournez-vous en.
Q : Si je supprime mes pensées et mes sentiments, je provoquerai une réaction.
M : Je vous parle pas de suppression. Je vous demande simplement de leur refuser votre attention.
Q : Mais ne faut-il pas que je fasse des efforts pour arrêter les mouvements du mental ?
M : Cela n'a rien à voir avec l'effort. Simplement, détournez-vous, regardez entre les pensées plutôt que de les regarder elles-mêmes. Quand vous marchez dans une foule, vous ne vous colletez pas avec tous les gens que vous croisez, vous vous contentez de trouver votre chemin entre eux.
Q : Si j'utilise la volonté pour contrôler le mental, cela ne fera que renforcer le mental.
M : Naturellement. Si vous luttez, vous invitez à la lutte. Mais si vous ne résistez pas, vous ne rencontrez pas de résistance. Si vous refusez de jouer le jeu, vous restez en dehors de lui.
Q : Combien de temps cela me prendra-t-il pour que je sois libéré de mon mental ?
M : Cela peut prendre un millier d'années, mais, en réalité, il n'y a pas besoin de temps. Tout ce dont vous avez besoin, c'est d'un sérieux absolu. Ici, vouloir c'est agir. Si vous êtes sincère, vous avez la volonté. En définitive c'est affaire d'attitude. Sauf la peur, rien ne vous empêche d'être, ici et dès maintenant, un Jnani. Vous avez peur de devenir impersonnel, peur de l'être impersonnel. Tout cela est très simple.
Détournez-vous de vos désirs et de vos peurs
et des pensées qu'ils créent, et à l'instant,
vous êtes dans votre état naturel.
Q : Sans qu'il soit question de reconditionner, de transformer ou d'éliminer le mental ?
M : Non, absolument pas. Isolez-vous de votre mental, c'est tout. Ne le suivez pas. Après tout, il n'existe pas un mental qui serait distinct des pensées qui vont et viennent en obéissant à leurs propres lois et non aux vôtres. Elles ne vous dominent que parce que vous vous y intéressez. Il en est exactement comme a dit le Christ : « Ne résistez pas au mal ». En lui résistant, vous ne faites que le renforcer.
Q : Oui, je vois. Tout ce que j'ai à faire est de dénier l'existence au mal, alors il s'évanouit. Mais est-ce que cela ne se ramène pas à une sorte d'auto-suggestion ?
M : C'est maintenant que l'auto-suggestion bat son plein, quand vous pensez être une personne prise entre le bien et le mal. Ce que je vous demande de faire, c'est de mettre fin à cette pensée, de vous éveiller et de voir les choses telles qu'elles sont. A propos de votre séjour en Suisse et de votre bizarre ami : qu'avez-vous gagné en sa compagnie ?
Q : Absolument rien. Son expérience ne m'a pas touché du tout. J'ai compris une chose : qu'il n'y avait rien à chercher. Quel que soit le lieu où j'aille, rien ne m'attendra au bout du chemin. La découverte n'est pas une affaire de déplacement.
M : Oui, vous êtes totalement distinct de tout ce qui peut être gagné ou perdu.
Q : Appelez-vous cela vairagya, lâcher-prise, renoncement ?
M : Il n'y a rien à quoi renoncer. Il suffit de cesser d'acquérir. Pour donner, il faut avoir et pour avoir, il faut prendre. Il est préférable de ne pas prendre. C'est plus simple que de pratiquer la renonciation qui conduit à une forme dangereuse d'orgueil spirituel. Toutes ces pensées et ces sélections, tous ces choix et ces échanges, tout cela, c'est comme de faire des courses dans quelque marché « spirituel ». Quelles sont vos affaires ici ? Quel sorte de marché allez-vous traiter ? Alors que votre intention n'est pas de faire des affaires, pourquoi toute cette angoisse perpétuelle du choix ? L'agitation ne vous mène nulle part. Il y a quelque chose qui vous empêche de vous apercevoir que vous n'avez besoin de rien. Découvrez ce quelque chose et voyez-en la fausseté. C'est comme d'avoir avalé un poison et de souffrir d'une soif inextinguible. Plutôt que de boire au-delà de toute mesure, pourquoi ne pas éliminer le poison et vous débarrasser de cette soif dévorante ?
Q : Il faudrait que j'élimine l'égo !
M :
La sensation « je suis une personne dans le temps et l'espace » est le poison.
Dans un sens, le temps lui-même est le poison.
Dans le temps, toutes les choses viennent à leur terme et de nouvelles naissent pour être dévorées à leur tour. Ne vous identifiez pas au temps, ne vous demandez pas avec angoisse : « Et maintenant, et maintenant ». Sortez du temps et regardez-le dévorer le monde. Dites : « Ma foi ! Il est de la nature du temps de mettre un terme à toute chose. Qu'il en soit ainsi, cela ne me concerne pas. Je ne suis pas inflammable et je n'ai pas besoin d'amasser de combustible ».
Q : Le témoin peut-il exister sans les choses dont il témoigne ?
M : Il y a toujours une chose dont il est le témoin, ou, sinon une chose, du moins son absence. Regarder est naturel et ne pose pas de problème. Le problème, c'est l'intérêt excessif qui conduit à l'auto-identification. Vous prenez pour réel tout ce en quoi vous vous absorbez.
Q : Le « je suis » est-il réel ou irréel ? Le « je suis ». est-il le témoin ? Le témoin est-il réel ou irréel ?
M : Ce qui est pur, sans mélange, non attaché, est Réel. Ce qui est souillé, mélangé, dépendant, transitoire est irréel. Ne vous laissez pas égarer par les mots, un mot peut avoir plusieurs sens, contradictoires même. Le « je suis » qui poursuit le plaisant et fuit ce qui est déplaisant, est faux ; le « je suis » qui considère le plaisir et la douleur comme inséparables, voit juste.
Le témoin qui est pris aux rets de
ce qu'il perçoit est la personne ;
le Témoin qui se tient à part,
indifférent et intangible, est
la tour de guet du Réel,
le point auquel l’Éveil,
inhérent au non-manifesté,
entre au contact du manifesté.
Il ne peut pas y avoir d'univers sans Témoin,
il ne peut pas y avoir de Témoin sans univers.
Q : Le temps consume le monde. Qui est le témoin du temps ?
M :
Celui qui est au-delà du temps,
celui qui ne peut être nommé.
Une braise incandescente que l'on fait tourner assez rapidement apparaît comme un cercle. Quand on arrête le mouvement, il reste la braise. De la même façon,
le « je suis » en mouvement crée le monde.
Le « je suis » pacifié devient l'absolu.
Vous êtes comme un homme qui marcherait dans une galerie avec une torche électrique. Vous ne voyez que ce qui se trouve dans son faisceau. Le reste est dans l'obscurité.
Q : Si c'est moi qui projette le monde, je devrais être capable de le transformer.
M : Bien sûr, vous le pouvez. Mais vous devez cesser de vous identifier à lui et vous devez le dépasser. Vous avez alors le pouvoir de détruire et de recréer.
Q : Tout ce que je veux, c'est être libre.
M : Il faut que vous sachiez deux choses : ce dont vous serez libéré et quels sont les liens qui vous attachent.
Q : Pourquoi voulez-vous anéantir l'univers ?
M : Je ne suis pas intéressé par l'univers. Qu'il soit ou non, il me suffit de me connaître moi-même.
Q : Si vous êtes au-delà du monde, vous ne lui êtes d'aucune utilité.
M :
Ayez pitié du Soi qui existe et
non du monde qui n'est pas !
Absorbé dans un rêve,
vous avez oublié votre
Soi véritable.
Q : Sans le monde, il n'y a pas de place pour l'amour.
M : Tout à fait d'accord.
Tous ces attributs : l'être, la conscience, l'amour et la beauté
sont les reflets du Réel dans le monde. Pas de Réel, pas de reflets.
Q : Le monde est rempli de choses et de gens désirables, comment pourrais-je me les imaginer non existants ?
M : Laissez. ce qui est désirable à ceux qui désirent. Renversez le courant de votre désir, donnez au lieu de prendre. La passion du don, du partage, débarrassera, tout naturellement, votre mental de l'idée d'un monde extérieur, et du désir de donner par dessus le marché. Seul demeurera le pur rayonnement de l'amour au-delà du donner et du recevoir.
Q : Dans l'amour, il faut qu'il y ait dualité, l'amant et l'aimé.
M : Dans l'amour, il n'y a pas même l'un, comment pourrait-il y avoir le deux ? L'amour est le refus de séparer, d'établir des distinctions. Avant que vous ne puissiez penser à l'unité, il faut d'abord que vous créiez la dualité. Quand vous aimez vraiment, vous ne dites pas : « Je vous aime » ; là où il y a activité mentale, il y a dualité.
Q : Qu'est-ce qui me ramène encore et encore en Inde ? Ce ne peut pas être uniquement la vie relativement moins chère. Ni le pittoresque et la diversité des impressions. Il doit bien y avoir une raison importante.
M : Il y a aussi l'aspect spirituel. La séparation entre interne et externe est moindre en Inde. Ici, il est plus facile d'exprimer l'intérieur dans l'extérieur. L'intégration y est plus aisée, la société est moins oppressive.
Q : Oui ! Dans L'ouest, tout n'est que tamas et rajas. En Inde sattva domine, il y a plus d'harmonie et d'équilibre.
M : Ne pouvez-vous pas dépasser les gunas ? Pourquoi choisir le sattva ? Soyez ce que vous êtes partout où vous êtes et ne vous souciez pas des gunas.
Q : Je n'en ai pas la force.
M : Cela ne fait que montrer que vous avez peu gagné par vos séjours en Inde. Ce que vous êtes vraiment, vous ne pouvez le perdre. Si vous étiez bien enraciné dans votre Soi, un changement de lieu ne vous affecterait pas.
Q : En Inde, la vie spirituelle est facile, il n'en est pas de même en occident. Il faut s'y conformer beaucoup plus à son environnement.
M : Pourquoi ne créez-vous pas votre propre environnement ? Le monde n'a de pouvoir sur vous qu'autant que vous lui en accordez. Rebellez-vous. Dépassez la dualité, ne faites pas de différence entre l'est et l'ouest.
Q : Que peut-on faire quand on se trouve dans un environnement parfaitement anti-spirituel ?
M : Ne faites rien. Soyez vous-même. Restez en dehors. Regardez au-delà.
Q : Il peut y avoir des conflits chez soi, les parents comprennent rarement.
M : Quand vous connaissez votre être réel, vous n'avez pas de problèmes. Vous pouvez plaire à vos parents, ou leur déplaire ; vous pouvez vous marier, ou ne pas le faire ; vous pouvez, ou non, gagner beaucoup d'argent ; c'est tout un pour vous. Ne faites qu'agir selon les circonstances, mais en collant aux faits, à la réalité, dans toutes les situations.
Q : N'est-ce pas un état élevé ?
M : Oh non ! C'est l'état normal. Vous le dites élevé parce que vous en avez peur. Commencez par vous libérer de la peur. Voyez qu'il n'y a rien qui peut vous effrayer. L'intrépidité est la porte du suprême.
Q : L'effort, quel qu'il soit, ne peut me débarrasser de la peur.
M : L'intrépidité vient d'elle-même quand vous vous êtes aperçu qu'il n'y a rien pour vous faire peur. Quand vous marchez dans une rue encombrée, vous ne faites que croiser les gens. Certains vous voient, d'autres vous jettent à peine un regard, mais vous ne vous arrêtez pas. C'est l'arrêt qui crée l'embouteillage. Avancez ! Ne tenez pas compte des noms et des formes, ne vous attachez pas à eux ; votre attachement est votre esclavage.
Q : Que dois-je faire quand un homme me gifle ?
M : Vous réagirez en fonction de votre caractère, inné ou acquis.
Q : Est-ce inévitable ? Le monde et moi, sommes-nous condamnés à rester comme nous sommes ?
M : Un orfèvre qui veut refaçonner un bijou doit d'abord le fondre en une masse d'or informe. De même, il faut retourner à son état originel avant qu'un nouveau nom et une nouvelle forme puissent émerger. La mort est essentielle au renouveau.
Q : Vous insistez constamment sur la nécessité d'aller au-delà, de se situer à part, de vivre solitaire. Vous n'employez pratiquement jamais les mots juste et faux, pourquoi ?
M : Il est juste d'être soi-même, il est faux de ne pas l'être. Tout le reste est conditionné. Vous êtes impatient de séparer le juste du faux parce que vous avez besoin d'une certaine base pour agir. Vous cherchez toujours à faire quelque chose. Mais une action fondée sur une motivation personnelle, sur une échelle de valeurs dirigée vers un but particulier, est pire que l'inaction car ses fruits sont toujours amers.
Q : L’Éveil et l'amour sont-ils une seule et même chose ?
M : Bien sûr ! L’Éveil est dynamique, l'amour est existant. L’Éveil, c'est l'amour en action. Le mental peut, par lui-même, actualiser de nombreuses possibilités, mais à moins qu'il ne soit inspiré par l'amour, cela reste sans valeur. L'amour précède la création. Sans lui, il n'y a que chaos.
Q : Dans l’Éveil, où est l'action ?
M : Vous êtes si incurablement fonctionnel ! A moins qu'il n'y ait du mouvement, de l'agitation, du tumulte, vous ne l'appellerez pas action. Le chaos est le mouvement pour le mouvement. L'acte véritable ne déplace pas, il transforme. Un changement de lieu n'est que pur déplacement ; un changement dans le cœur est un acte. Souvenez-vous seulement que
rien de perceptible n'est réel.
L'activité n'est pas l'action.
L'action est cachée, inconnue, inconnaissable.
Vous ne pouvez en connaître que les fruits.
Q : Dieu n'est-il pas le créateur de tout ?
M : Pourquoi introduisez-vous un créateur extérieur. Le monde se crée lui-même à partir de lui-même. C'est un processus infini, le transitoire engendrant le transitoire. C'est votre égo qui vous fait penser qu'il y a un créateur. Vous créez un Dieu à votre image, si lugubre soit-elle.
Par l'intermédiaire du film de votre mental
vous projetez un monde et aussi un Dieu
pour lui donner une cause et un but.
Tout cela n'est qu'imagination, sortez-en.
Q : Il est vraiment difficile de considérer le monde comme purement mental ! Sa réalité tangible paraît si convaincante.
M : C'est là le mystère de l'imagination, qu'elle semble si réelle. Vous pouvez être marié ou célibataire, vous pouvez être moine ou chargé de famille ; là n'est pas le point important. Êtes-vous l'esclave de votre imagination ou ne l'êtes-vous pas ? Quelque décision que vous preniez, quel que soit le travail que vous entrepreniez, cela sera obligatoirement fondé sur l'imagination, sur des hypothèses qui se prétendent des faits.
Q : Je suis là, assis en face de vous. Quelle part l'imagination y a-t-elle ?
M : La totalité.
Même l'espace et le temps sont imaginés.
Q : Cela veut-il dire que je n'existe pas ?
M :
Moi non plus, je n'existe pas.
Toute existence est imaginaire.
Q : L'être est-il aussi imaginaire ?
M :
L'être pur qui remplit tout,
qui est au-delà de tout,
n'est pas l'existence qui est limitée.
Toute limitation est imaginaire,
seul le non-limité est Réel.
Q : Quand vous me regardez, que voyez-vous ?
M : Je vous vois vous imaginant être.
Q : Il y en a beaucoup comme moi. Cependant, nous sommes tous différents.
M :
La totalité de toutes les projections
est ce qu'on appelle maha-maya,
la Grande illusion.
Q : Et quand vous vous regardez, que voyez-vous ?
M : Cela dépend de ma façon de regarder.
Quand je regarde au travers du mental,
je vois d'innombrables gens.
Quand je regarde au-delà du mental,
je vois le Témoin.
Au-delà du Témoin,
il y a l'intensité infinie
de la vacuité et du silence.
Q : Comment agir avec les autres ?
M : Pourquoi faire des plans, et dans quel but ? De telles questions font preuve d'angoisse. La relation avec autrui est une chose vivante. Soyez en paix avec votre Soi intérieur et vous serez en paix avec tout le monde. Réalisez que vous n'êtes pas maître de ce qui arrive, que vous ne pouvez contrôler l'avenir, sauf dans des matières purement techniques. On ne peut pas planifier les relations humaines, elles sont trop riches et trop variées. Soyez seulement compréhensif, faites preuve de compassion, libérez-vous de la recherche du moi.
Q : Je ne suis certainement pas le maître de ce qui arrive. J'en suis plutôt l'esclave.
M : Ne soyez ni le maître ni l'esclave. Tenez-vous à l'écran.
Q : Cela implique-t-il d'éviter d'agir ?
M : Vous ne pouvez pas éviter l'action. Elle arrive, comme tout le reste.
Q : Mes actes, eux, je peux sûrement les contrôler.
M : Essayez. Vous vous apercevrez très vite que vous faites ce que vous devez faire.
Q : Je peux agir en fonction de ma volonté.
M : Vous ne connaissez votre volonté qu'après avoir agi.
Q : Je me souviens de mes désirs, des choix que j'ai faits, des décisions que j'ai prises et j'agis en conséquence.
M : C'est alors votre mémoire qui décide, pas vous.
Q : Où est-ce que j'interviens ?
M : Vous rendez cela possible en lui prêtant attention.
Q : N'y a-t-il rien de tel que le libre-arbitre ? Ne suis-je pas libre de désirer ?
M : Oh, non ! Vous êtes contraint de désirer. En Inde, l'idée même de libre-arbitre paraît si ridicule qu'il n'y a pas de mot pour lui. La volonté est engagement, fixation, esclavage.
Q : Je suis libre de choisir mes limitations.
M : Il faut d'abord que vous soyez libre. Pour être libre dans le monde, il faut que vous soyez libéré du monde. Sinon le passé décide pour vous et votre avenir. Vous êtes pris entre ce qui est arrivé et ce qui doit arriver. Appelez cela destin, karma, mais jamais liberté. Commencez par retourner à votre être véritable, puis agissez à partir du cœur de l'amour.
Q : Où est, dans le manifesté, la marque du non-manifesté ?
M : Il n'y en a pas.
Dès l'instant où vous cherchez
la marque du non-manifesté,
le manifesté s'évanouit.
Si vous essayez de comprendre le non-manifesté à l'aide du mental, vous passez immédiatement au-delà du mental, comme quand vous attisez le feu avec un bâton, vous le brûlez. Utilisez votre mental pour examiner le manifesté. Soyez comme le poussin qui frappe sa coquille du bec. Cela lui aurait été de peu d'utilité de spéculer sur la vie à l'extérieur de la coquille, mais de donner des coups de bec sur la coquille la brise de l'intérieur et libère le poussin. Comme lui, brisez le mental de l'intérieur par l'investigation et la mise en évidence de ses contradictions et de ses absurdités.
Q : D'où vient ce désir de briser la coquille ?
M : Du non-manifesté.
Le monde entier a jailli du Sat-Chit-Ananda, on l'appelle la racine du monde. C'est la félicité. Mais le Sat-Chit-Ananda n'est pas vrai, c'est un concept. Il est votre êtreté : « je suis, je suis connaissance, je suis félicité. » Tout cela est l'œuvre du mental et il doit être transcendé car il vous donnera toujours une fausse compréhension. Si la réalité n'était pas, rien ne pourrait apparaître. L'écran, la réalité, est là, c'est pourquoi les images peuvent se former, mais l'écran n'a ni amour ni indifférence. N'aimez personne et ne détestez personne, c'est le mental qui fait ces discriminations, l'écran n'en fait pas. Les cinq doigts sont différents, mais vous savez que c'est votre main ; c'est cela l'Unité.
Si vous comprenez que vous n'êtes pas le corps, votre conscience devient universelle. Toute limitation disparaît. Vous devenez la conscience-connaissance universelle. Malgré tout cette connaissance est aussi illusion, ignorance finalement. En effet, la source de la conscience-connaissance elle-même, a pour origine l'oubli ou l'ignorance de la réalité. Vous devenez donc la création toute entière, la conscience-connaissance du monde, mais c'est encore l'illusion. Cet ego qui devient la conscience universelle est, en fait, le pire des ego : « je suis le créateur du monde, je suis omnipotent, etc. » Mais vous êtes le créateur de plus d'illusion, de plus d'ignorance, alors quelle en est l'utilité ? Cette compréhension que la conscience universelle est toujours l'ego doit mûrir, pour se dissoudre dans la réalité. Dans la réalité finale, il n'y a ni conscience, ni ignorance et c'est ce que vous êtes, c'est votre véritable nature.
C'est à partir de l'ignorance que la connaissance est apparue et vous voyez l'illusion entière se dérouler. L'ignorance s'est surimposée à la réalité, de cette ignorance un concept a surgi, la connaissance et sur ce concept le monde est créé. Concept veut dire connaissance. Tout le monde fonctionne avec la connaissance, c'est par elle que vous créez et agissez. Prendre naissance est un concept et s'ensuivra son cortège de douleurs toute votre vie durant. La vie est un concept, rien d'autre. Quand elle prend fin, le concept disparaît et tout se termine alors.
Ranjit Maharaj
![](immortel-parabrahman.jpg)
![](illusion-manifeste.jpg)
Les Bhajans de la Lignée de Shri Ramakant Maharaj
ici en pdf (en français)
CHIDANANDA (Bhajan de la Lignée)
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je ne suis pas le mental, l’intellect, l’égo ou le subconscient. Je ne suis pas les oreilles, la langue, le nez ou les yeux.
Je ne suis pas l’espace, la terre, le feu ou le vent.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je ne suis pas la force de respirer, les sept éléments vitaux du corps, ni les cinq couvertures.
Je ne suis pas la parole, les mains, les pieds, ni le rectum.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je ne suis pas l’envie, la cupidité, ni le désir, ni l’attirance.
Je ne suis pas l’arrogance, ni la fierté, ni la jalousie, ni la religion, ni la fortune, ni les dépenses pour l’humanité, ni la libération.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je ne suis pas la vertu, le péché, la joie et la tristesse. Je ne suis pas le Mantra, le pèlerinage, les Écritures, les offrandes ou le feu rituel.
Je ne suis pas la nourriture, l’action de manger et ce qui est mangé.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je ne suis pas la mort, le doute, ni la discrimination de castes. Je ne suis pas le père, la mère, donc pas de naissance.
Je ne suis pas le frère, ni l’ami, ni le Gourou, ni l’aspirant.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis au-delà des concepts, sans changement, au-delà de la forme.
Je suis tout étendu dans tous les sens. Je vois l’égalité dans chacun. Je ne suis ni libéré, ni lié.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
Je suis l’Éternelle Béatitude. Je suis Shiva.
C’est complet et parfait. C’est complet et parfait.
Du complet et parfait, le complet et parfait devient manifesté.
Si le complet et parfait sort du complet et parfait, même alors le complet et parfait restera toujours.
L’UN, qui avec compréhension, savoure le monde.
(ARATI)
J’ai reçu une grande fortune qui m’a poussé hors des affaires du monde.
J’ai rencontré mon Sadgourou et je fais ce qu’Il me demande.
Il m’a mis dans la bonne direction, vers l’intérieur où est le Soi.
Après la traversée des attributs, vous atteindrez Pandhari, où Vithoba réside.
Comment décrire ce bonheur ? Quand l’égo s’en va le bonheur demeure.
Par la lumière de la compréhension qu’Il m’a donnée, mon égo est complètement détruit.
Je vais vers le Soi. Le corps reste mais je ne m’occupe plus de lui.
Le mental devient pas de mental, aucune trace de lien demeure.
Fusionné dans le Soi, j’ai oublié pourquoi je suis venu ici ! Les mots sont sans signification.
Je suis devenu l’UN, je vois seulement Moi-même partout.
Les Trois attributs sont brûlés, je les ai transcendés.
L’Indestructible, l’Eternel est merveilleux. La lumière de l’Illumination de Soi ne diminue jamais.
Le nom et la forme créent la dualité, mais IL est Un, partout.
Namdev : « Si ce que je dis n’est pas la vérité, je couperai ma tête ! ». (Mais personne ne peut couper Cela !!)
L’univers entier et son créateur sont contenus dans une graine de sésame.
Tout vient de zéro, retourne à zéro et n’a aucun volume. Tout est rien.
Le propriétaire de l’univers entier demeure à l’intérieur d’une petite maison graine de sésame.
La plus petite graine contient tous les trois mondes.
Cependant rien n’est plus grand que Moi-même, qui n’ai aucun volume.
Le propriétaire de Cela va et vient.
De rien vient toutes les choses, même les Dieux.
Rien est très puissant. Rien ne peut arriver.
Oubliez la connaissance et l’ignorance et vous êtes LUI.
Quand quelque chose est là, vous ne pouvez rien faire de plus ou de moins.
Tuka dit, dans une petite graine ou une petite goutte se trouve l’ensemble de la création transitoire.
5. Je suis la joie originelle
Partout la béatitude ! À l’intérieur et à l’extérieur !
Joie ! Joie ! Rien n’est là excepté Moi-même. Je suis la Joie Originelle !
IL est partout et Cela est la joie !
À l’intérieur et à l’extérieur, tout est joie, au-delà de la connaissance.