Celui qui a atteint le Soi
vit dans l'état du Soham
par Sri Siddharameshwar Maharaj
Source : Sri Siddharameshwar Maharaj « Embrasser l'immortalité (Amrut laya) » - Les Deux Océans – Paris
En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Shri Nisargadatta Maharaj
Au niveau ultime la Présence est dissoute. vous ne serez pas conscient quand la Présence devient Omniprésence.
Tout est Un. Il n'y a pas d'individualité.
Shri Ramakant Maharaj
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Shri Siddharameshwar Maharaj
COMPTE-RENDU N° 99 DU 17-07-1929
Le sage a quitté son corps mais son pouvoir agit toujours. Cela ne signifie pas que l'être accompli obéit ainsi à un désir de revenir.
(Dasbodh, D 10, S 7, 0 3)
Bien que l'être réalisé soit présent parmi nous et agisse comme nous extérieurement, il est différent de nous en ce sens qu'il s'est détaché des quatre corps. De même, vous devez procéder à cette séparation et observer le monde avec vigilance pour atteindre la réalisation.
On dit que le Soi Tout-Puissant n'a ni ombre ni reflet bien qu'il prenne la forme de la connaissance. Un jour, un maître décida de tester certains de ses disciples qui déclaraient avoir atteint la réalisation. Il leur dit qu'un éveillé ne laisse aucun reflet dans le miroir. Un miroir leur fut tendu et, avant même d'apercevoir leur propre reflet, les moins résolus d'entre eux revinrent sur leur déclaration. Les autres, décidés à mener le test jusqu'au bout, regardèrent dans le miroir et ne virent que le regard curieux de leur propre reflet. Leur assurance faiblit et ils durent admettre qu'ils n'étaient pas éveillés. Ils devaient tous continuer à pratiquer. Un seul toutefois persévéra dans sa déclaration, et les autres le réprimandèrent sur le champ, arguant de la preuve irréfutable dont ils venaient tous d'être témoins. Ils l'accusèrent de mentir. Ils se tournèrent alors vers le maître, qui à leur grand étonnement, semblait satisfait. Il demanda au disciple d'étayer son affirmation. Le disciple répondit que le reflet qu'il voyait dans le miroir était le reflet du corps et, puisqu'il n'était pas le corps mais le Soi, ce reflet ne pouvait pas être le sien. Même s'il assume la forme de la connaissance, le Soi ne peut pas être capté par un miroir. Le maître approuva la réponse de son disciple.
Pour atteindre l'éveil, vous devez savoir discerner. Si le corps de Krishna est présent devant vous, allez-vous penser qu'il est ce corps de chair et de sang que vous voyez ? Si votre perception est juste, il vous paraîtra évident que de prendre Krishna pour cet assemblage de chair et d'os serait pure ignorance. Votre vision doit être perspicace pour discerner le réel car ce qui apparaît à l'œil du mortel n'est pas le réel. Le réel est au-delà de ce que l'œil peut appréhender. Celui qui a atteint la connaissance remonte à la source de toute chose pour arriver à la conclusion que tout est irréel, y compris le monde matériel.
L'instrument de la vision étant irréel, ce que vous voyez et percevez à travers le mécanisme de la vision est nécessairement de même nature. Tout semble exister sur la seule base de nos pensées et de nos concepts. N'oubliez pas que les concepts sont illusoires ! Quand vous comprenez, et par conséquent expérimentez que l'origine de toute chose est la force de vie, alors l'illusion se dissipe. Mais si vous ne comprenez pas que le Soi imprègne tout et que de lui tout procède, vous resterez ignorant.
Le Soi se révèle à vous dans sa nudité absolue. Mais le mortel ne peut le percevoir, bien qu'il soit lui-même le Soi. Votre corps supra-causal est la connaissance. Sur le chemin de la réalisation du Soi vous devez tout d'abord acquérir cette connaissance, mais elle devra ensuite être éliminée en s'immergeant dans le Soi. Ni la connaissance, ni l'ignorance n'existent dans la nature du Soi. Ce n'est qu'après la dissolution de la connaissance que vous parvenez à la connaissance absolue, à la réalisation finale du Soi.
Tout le monde possède la connaissance sous la forme de la conscience mais quand l'ignorant devient conscient de cette connaissance il se laisse envahir par l'orgueil, parce que l'orgueil et la connaissance sont intimement liés. Les portes de l'ego sont alors grandes ouvertes ! Maintenant ce simple mortel sur la seule base de cette connaissance se croit supérieur aux autres, il pense qu'il est extraordinaire, totalement différent des autres et qu'il vit entouré d'une foule médiocre. La dualité qui caractérise ce sentiment ne fait que l'éloigner davantage du Soi. Il n'arrive pas à dissoudre sa connaissance dans le Soi et, contrairement à son sentiment, il est maintenant réduit au statut de simple mortel encore plus ignorant qu'auparavant !
Dans le Hamsa gîta (Le chant du Seigneur Shiva), Sanaka demande au Seigneur Brahma de lui dévoiler le moyen d'atteindre le Soi. Ce dernier ne pouvant donner un tel enseignement, demanda conseil à Krishna qui apparut à Sanaka sous la forme d'un cygne. Sanaka lui demanda de lui révéler sa véritable identité mais Krishna refusa, prétextant que celui qui faisait cette demande n'était pas prêt à recevoir cette révélation. Sanaka finit par admettre qu'il n'était pas libre des désirs qui limitent la conscience individuelle, et c'est alors seulement que le Seigneur Krishna lui enseigna que le seul moyen d'atteindre le Soi (Krishna) était de vaincre tous les désirs qui entravent et limitent la conscience, et qu'ils ne peuvent être éradiqués que par la vénération au Soi. Une dévotion indéfectible au maître mène à l'accomplissement du Soi. Le Soi est si proche de vous qu'il peut être compris facilement. Mais un simple mortel qui brille de tous les feux de l'orgueil le trouve absolument incompréhensible, tant il est recouvert par l'ignorance. Aveuglé par l'ego, le mortel aspire pourtant à la conquête du monde, mais il ne pourra jamais, à cause de ce même ego, comprendre la nature unique du Soi.
Un jour, M. Poredi, habituellement très ponctuel, arriva en retard et on le lui reprocha. Mené par son ego il réagit vivement à la critique, clamant qu'il arrivait toujours avant les autres et même avant la personne qui lui reprochait son retard ! L'ego vous soumet à ce genre de réactions et vous ratez là une occasion de comprendre.
La réalisation du Soi est le seul domaine dans ce monde où « qui perd gagne » ! Il est transfiguré dans le Tout-Puissant lui-même. Bien qu'il soit vivant, le vrai dévot est mort car son ego a été totalement détruit. Si le pot de terre comprend qu'il n'est rien d'autre que de l'argile, il cesse d'exister en tant que pot.
L'état du Soham, dans lequel on affirme « je suis Lui »,
n'apparaît que lorsque l'ego cesse d'exister.
Celui qui a atteint le Soi vit dans l'état du Soham
,
mais une pratique rigoureuse est nécessaire pour y arriver. On dit que pour conquérir le monde du Soham l'effort doit être intense. Mais rappelez-vous que vous pouvez vous l'approprier étape par étape !
La moitié de ce royaume est conquise quand vous atteignez la connaissance.
Le Seigneur Tout-Puissant n'est autre que cette connaissance ou conscience,
il réside dans le cœur de chacun.
La seconde moitié du monde de Soham est conquise lorsque la connaissance se
dissout dans le Soi. Vous atteignez alors la réalité.
« AUM. » est l'expression complète de l'homme mortel. Elle est composée de trois lettres et d'un point. Le A représente la connaissance saturée de l'ego. Le mortel prend forme et se tient maintenant séparé du Soi. Le U est l'acceptation par la pratique de cette forme séparée. Le M est l'ignorance, état dans lequel le mortel se complait désormais. Cette ignorance est renforcée par le point qui représente l'oubli de celui qui est au-delà du soi individuel comme du soi universel. La connaissance ou conscience naît de cet oubli.
À la recherche de soi, la connaissance pure est la vérité que l'on doit atteindre. Mais dans la nature profonde du Soi cette connaissance est fausse également car il n'existe là ni ignorance, ni connaissance, ni vérité, ni illusion. Ainsi, pour atteindre la réalisation, cette connaissance doit se dissoudre dans le Soi. Comprendre le Soi est notre véritable but. Lui seul se maintient après l'abandon de tous les concepts de vérité, de faux, d'ignorance et de connaissance, de Brahma et de son paradis, de Vishnou, de Shiva et de leurs cieux respectifs. Celui qui se maintient après l'abandon de tous ces concepts est le Dieu suprême.
A ce point une question se pose naturellement : Pourquoi s'efforcer d'obtenir la connaissance si c'est pour l'abandonner ensuite ? Parce qu'il s'agit de la connaissance de la nature de l'ignorance. Elle aide à détruire l'ignorance. Comme le feu combat le feu ou comme l'on ôte une épine à l'aide d'une autre épine, le concept d'ignorance est anéanti par celui de connaissance. Une fois que l'ignorance est démasquée et détruite, la connaissance a fait son travail et elle n'est plus nécessaire. Comme l'ignorance, la connaissance est un concept, elle est irréelle. Ces deux concepts doivent donc être déracinés pour que la connaissance absolue (Vidgnyan) se révèle. C'est la compréhension finale, l'expérience directe du Soi. Expérience, elle, de première main ! Vous avez alors atteint la réalisation et c'est ici que la recherche de l'éveil se termine.
Ce processus graduel pour atteindre la réalisation doit être parfaitement intégré. Une investigation approfondie qui consiste à remonter à l'origine de tout ce que vous rencontrez, conduit à la réalisation du Soi. Maintenant, vous comprenez que la précieuse opportunité d'une vie humaine peut facilement être gâchée dans la recherche futile des biens matériels. Rappelez-vous que la réalisation du Soi ne survient pas immédiatement après l'écoute des sermons ou après une réflexion intense ou même parce que vous avez un ardent désir du Soi, mais seulement après une intégration totale au Soi suprême. Cette vérité est un fait et il y a un cheminement précis qui y mène. Écouter attentivement les sermons du maître et faire preuve d'une détermination obsessionnelle dans la recherche conduit à coup sûr à la connaissance de la vérité, mais l'expérience directe à lieu seulement quand il n'y a plus que le Soi.
De passage dans la ville de Mathura, le sage Durvasa (celui qui est libre de tout désir) décida finalement de s'y installer. Krishna résidait dans la cité voisine de Gokul qui n'était séparée de Mathura que par les eaux tranquilles de la rivière Yamuna. A l'occasion de la fête de gurupurnima, dédiée au maître, quelques disciples de Gokul chargés de fleurs et de friandises, voulaient rendre hommage à leur maître Durvasa. La rivière était en crue ce jour-là et le débit violent de ses eaux emportait tout sur son passage, n'autorisant aucune traversée. Le passage du bac ayant été interrompu ils n'avaient aucun moyen de se rendre à Mathura. En désespoir de cause ils allèrent visiter Krishna. Krishna leur dit de se rendre sur les rives de la rivière et de lui parler en ces termes : « Ô Yamuna, rivière sacrée, c'est Krishna le chaste qui nous envoie, nous vous prions de nous laisser passer ». Sur ces mots la rivière s'ouvrit en un passage étroit cerné des parois cristallines de ses eaux. Les murailles d'eau maintenues par un pouvoir invisible s'élevaient au-dessus de leurs têtes. Empruntant ce chemin, ils purent rejoindre leur maître et lui rendre hommage.
Ils restèrent toute la journée en sa compagnie et se réjouirent ensemble d'un repas festif. Mais au moment de partir, le chemin ouvert dans la rivière avait disparu et ils furent à nouveau désemparés. Le sage Durvasa leur conseilla de dire à Yamuna : « Nous vous prions, O sainte rivière, de calmer vos eaux furieuses, notre maître le sage Durvasa qui observe un jeûne perpétuel vous conjure de nous laisser passer ». La rivière s'ouvrit immédiatement laissant le passage à la petite troupe qui put ainsi atteindre l'autre rive sans encombres.
Les disciples furent profondément ébranlés par la tournure des événements. Comment le Seigneur Krishna bien connu pour sa polygamie pouvait-il se déclarer chaste ? Et comment leur maître Durvasa qui venait de participer à un festin pouvait-il dire qu'il observait un jeûne ? La réponse est évidente pour le sage. C'est le corps de Krishna qui est polygame, lui en tant que Soi étant toujours dans l'abstinence vis-à-vis du monde. De même, c'est le corps de Durvasa qui a mangé tandis que lui, dans sa véritable nature, jeûne éternellement. Vous êtes le Seigneur Krishna et au moment où vous réalisez le Soi dans sa nature spontanée, la rivière de l'existence mondaine qui d'ordinaire est un torrent furieux ne vous trouble plus et reflue naturellement.
Vous savez maintenant que le monde matériel est illusoire, qu'il n'est qu'un concept, votre concept. Dès que vous comprenez que tout est faux, ce faux ne peut pas persister. Un discernement aiguisé vous permet d'accomplir ce qu'une vie passée dans la pénitence ne saurait atteindre. Le concept du monde matériel doit être éradiqué. Mais comment éliminer tous les faux concepts qui s'y rattachent ? Il suffit dans un premier temps de s'en tenir aux concepts positifs pour voir les concepts négatifs s'évanouir.
Comment Dieu peut-il demeurer en chacun des innombrables êtres vivants ? Il existe en eux sous la forme de la connaissance, c'est pourquoi vous devriez toujours dire que vous êtes le Tout-Puissant, « Je suis Lui », Soham. Cela reste bien entendu un concept, un bon concept sans aucun doute mais toujours un concept, celui de l'éveillé. Croire que je suis un être mortel est le concept de l'ignorant, il vous emprisonne ! Bon et mauvais sont également des concepts, le suprême est au-delà de tout.
Quand le concept négatif du monde matériel disparaît, la connaissance jaillit en vous. Comme nous l'avons dit, cette connaissance aussi doit être éliminée car dans la réalité il n'y a ni dualité, ni non dualité. L'être réalisé apparaît au mortel ordinaire comme une entité étrange, pour ne pas dire un fantôme ! L'être humain pense, il est pourvu de discernement mais s'il ne cultive pas ces qualités, il n'est guère plus qu'un animal. S'il ne pense pas, il ne vaut pas mieux qu'un charançon au milieu du grain ! Les concepts et les pensées de l'ignorant se ramifient à l'infini et forment l'arbre gigantesque du désir. Jusqu'où vous emporteront vos désirs ?
Un petit peu peut détruire beaucoup. Deux heures occupées à la connaissance peuvent balayer vingt-deux heures d'ignorance ! Un bon concept détruit les mauvais, même s'ils sont nombreux et tenaces. Quelques concepts purs peuvent venir à bout de l'ignorance. Une fois que tous ces mauvais concepts sont éliminés, les bons doivent aussi être abandonnés. Ils doivent se dissoudre dans le Soi. Cette alchimie n'est possible que dans la compagnie des saints qui ont l'expérience ultime. Dites avec force et détermination : « je ne veux pas le faux » et vous aurez l'expérience du sage.
TAD NISKALA (Ce que je ne suis pas) par Shankaracharya
Om, je ne suis pas le témoin, l’intelligence, l’ego ni le mental, ni les oreilles ni la langue, ni les sens de l’odorat et de la vue, ni l’éther ni l’air.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne suis ni le prana ni les cinq souffles essentiels, ni les sept éléments du corps, ni ses cinq gaines, ni les mains, ni les pieds, ni la langue, ni l’action d’aucun membre.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Pas de peur, d'avarice ou d'ignorance, pas de préférence, aucune fierté ni ego, ni dharma ou Libération, je ne suis ni le désir ni l’objet du désir.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni plaisir ni haine, ni vertu ni vice, ni mantra ni espace sacré, pas de Védas ni de sacrifice. Je ne suis ni le mangeur ni la nourriture ni l’acte de manger.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni la peur, ni la mort, ni différence de caste, ni père, ni mère, pas de naissance, ni ami, ni camarade, ni disciple, ni gourou.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je n’ai ni forme ni besoin, omniprésent j’existe partout, pourtant je suis au-delà des sens, je ne suis ni le salut ni quelque chose de connaissable.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !