L'illusion primordiale est la conscience et le monde entier, constitué des cinq éléments et des trois attributs, existe en elle
par Sri Siddharameshwar Maharaj
Source : Sri Siddharameshwar Maharaj « Embrasser l'immortalité (Amrut laya) » - Les Deux Océans – Paris
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Siddharameshwar Maharaj
COMPTE-RENDU N° 46
« Le vent naît de l'espace comme l'illusion primordiale du Réel. De la même façon, comprenez que les trois attributs et les cinq éléments sont issus de ce vent ».
(Dasbodh, D 10, S 9, o 1)
Votre Soi est pur, pur comme le ciel. De la même façon que l'air a été créé dans l'espace, l'illusion primordiale, le « je suis », a émergé du Soi.
Pour recouvrer votre véritable nature, vous devez tout d'abord reconnaître votre origine en tant que prakriti/Purusha, ou Shiva/shakti, c'est-à-dire en tant que conscience, qu'observateur ou témoin. Les Écritures décrivent l'état originel comme semblable à l'espace. Shankara appelle cet état naturel « l'illusion primordiale » (mula maya).
Le Soi suprême est la réalité finale, il n'a pas de nom, il est au-delà du Soi qui s'est manifesté en tant que force de vie. Il est Brahmatita, ce qui signifie au-delà du Brahman.
Les objets qui ont un nom et une forme sont éphémères et n'ont donc pas de réelle existence. Leur existence est purement conceptuelle car ils n'existent que par le nom.
La conscience a surgi du Soi et l'a recouvert mais, comme tout ce qui s'est manifesté, elle n'est pas éternelle.
Quiconque a pris naissance devra mourir, qu'il soit roi, pauvre homme ou fakir ! Même celui qui a atteint le Divin devra périr ! La réalité, elle, n'a jamais été créée, rien ni personne ne pourra donc la détruire. Elle est éternelle et évidente en soi, et c'est cela notre véritable nature.
La source est la conscience ou le « je suis » qui n'a pas de réelle existence mais qui semble exister malgré tout.
C'est l'illusion primordiale que l'on nomme aussi Mère ou Déesse, mais même si on lui donne des noms féminins, il ne s'agit bien sûr pas d'une femme.
Tout ce qui est créé à partir de cette origine est irréel. Ainsi, cette illusion qui apparaît au commencement est l'impulsion de la conscience ou encore la connaissance « je suis ».
Elle est aussi Shiva/Shakti la connaissance associée à son pouvoir ou Aumkar, le son primordial. La conscience est donc le dieu créateur (Ishvara) et son pouvoir est l'impulsion d'énergie (prakriti ou maya). La conscience est appelée Vishnou par les vaishnaïte et Shiva par les Shaivaïtes. Quand le mouvement du « je suis » se produit dans la conscience elle devient Lakshmi, la parèdre du Seigneur Vishnou. Lorsque l'on dit que Lakshmi quitte sa demeure, cela signifie que l'impulsion du « je suis » s'élève. On dit aussi que Lakshmi sert le Seigneur Vishnou qui est la connaissance pure. L'impulsion « je suis » apparaît dans la connaissance ou conscience pure et elle est à son service. Mais en fait, la base de toutes ces manifestations est le Soi Suprême, tous les dieux viennent du Soi.
Govinda est celui qui fait fonctionner les sens (go, sens ; vinda, conduire). Le monde existe parce que la conscience vitalise les sens. Le Dieu créateur a de nombreux noms : force de vie, conscience, témoin, agissant ... Il est le fondement sur lequel l'illusion s'élève.
L'illusion n'existe que tant que le Dieu créateur se maintient. Si la conscience s'évanouit l'illusion disparaît aussi. C'est alors que le corps meurt et il est vite emporté au crématorium.
Si l'on vous demande de conserver le corps inerte de cet être que vous avez tant aimé durant des années, vous vous exclamez : « Non, je n'en veux pas » !
Quand la vie s'arrête l'illusion s'évanouit aussi.
Tant que votre corps est en vie les autres s'inquiéteront de la moindre de vos petites misères, mais dès qu'il meurt, ils l'emportent au crématorium au plus vite, pressés de s'en débarrasser. Et d'ailleurs, si un défunt apparaît dans leur rêve, ils en sont grandement effrayés !
L'illusion primordiale est la conscience et le monde entier, constitué des cinq éléments et des trois attributs, existe en elle.
Tout comme l'arbre entier est présent dans la graine sous une forme subtile, le monde entier existe dans la conscience. Les arbres croissent à partir de la graine, de même le monde croît à partir de la graine de la conscience qui est illusion. Comprenez la véritable nature de cette illusion.
Réfléchissez par exemple à l'expérience du sommeil. Vous n'avez là aucune perception de l'existence du monde, de votre femme ou même de votre propre corps qui est pourtant si près de vous ! Le monde n'existe que tant que vous le percevez et quand il est oublié cet état est appelé le sommeil. Dans le rêve la même conscience projette un autre monde. Quand l'espace et les objets sont créés dans le rêve, y a-t-il réellement un espace ? Non. C'est la conscience qui crée cet espace. Elle est le support du monde entier. Dans le rêve vous créez un nombre infini de mondes, pourquoi alors ne pouvez-vous pas créer un autre monde dans ce monde ? Cela ne dépend que de votre propre résolution car, ce qui fait obstacle, c'est le concept que vous entretenez d'être un corps au pouvoir limité. Vous êtes persuadé que vous n'avez aucun pouvoir alors qu'en réalité tout ce que vous pensez peut se produire ! L'être humain est l'arbre de l'accomplissement des désirs.
La conscience est l'illusion primordiale, elle est le Dieu créateur cause de l'existence du monde.
S'il n'y a pas de conscience il n'y a rien.
Vous croyez fermement que ce monde existe, mais c'est une croyance dont il faut vous débarrasser !
Quels que soient les rêves qui vous viennent ils finissent tous par disparaître. La conscience projette le rêve d'un monde qui sera inévitablement détruit. Votre femme, vos enfants, les dieux et les démons seront tous anéantis ! Quand la conscience projette un autre monde, la destruction du précédent en résulte automatiquement, mais quand elle se fond dans le Soi, la réalité seule se maintient. S'il y a un maître de ces mondes infinis c'est bien la conscience, mais dès qu'elle se résorbe dans le Soi tous les univers sont anéantis !
L'impulsion « je suis » (prakriti) qui s'est élevée dans le Soi et la connaissance (Purusha) sont deux aspects du même Soi, comme la lumière et la chaleur sont deux caractéristiques du soleil qui n'en reste pas moins unique pour autant.
A l'aube de sa vie l'homme est appelé enfant et quand il grandit on dit que c'est un adulte. L'homme est le même mais ses noms diffèrent en fonction des diverses étapes de sa vie.
L'illusion primordiale n'est rien d'autre que la conscience et elle n'a pas de genre même si on lui donne des noms tantôt féminins, tantôt masculins. Il ne s'agit pas de penser en termes de femme ou d'homme. Le Gange est une rivière et son nom est féminin, mais elle n'est pourtant que de l'eau. Ainsi Purusha (masculin) est la connaissance et prakriti (féminin) est le souffle ou pouvoir (vayu). La conscience subtile présente dans ce souffle est le créateur.
Une chose qui peut être connue peut aussi être oubliée, c'est ainsi que la connaissance et l'ignorance vont toujours de pair. Les trois attributs et les cinq éléments sont un mélange de connaissance et d'ignorance.
Vishnou est la connaissance et sans connaissance aucune action ne peut avoir lieu.
Si l'on regarde vers l'intérieur on voit le Soi, alors que si le regard est dirigé vers l'extérieur la conscience du « je » s'élève et s'identifie au corps.
Tout ce qui existe dans le rêve n'est que la conscience qui s'identifie à la personne, au buffle ou à la charrette qui passe, etc. Quand cette conscience s'évanouit la vie prend fin.
Ainsi l'existence phénoménale n'est due qu'à la conscience de soi.
Elle donne le statut divin à dieu et le statut spectral au fantôme qui d'ailleurs n'existe que si l'on croit en son existence. De même que les planètes n'affectent que ceux qui croient à l'astrologie. Si vous ne reconnaissez pas cette évidence, vous vous laissez piéger dans un labyrinthe de problèmes. Un chien qui lève la patte et urine sur la statue d'un Dieu n'encourt pas pour autant sa colère ! Dieu maudit-il la souris qui mange les offrandes qui lui sont destinées ? Le mental vous enchaîne à toutes sortes de croyances et de contraintes. Celui qui se connaît n'est jamais la proie des mauvais esprits ou des fantômes parce qu'il est libre de tout concept. L'ignorant quant à lui, entretient une multitude de concepts et de superstitions sur fond de bons et de mauvais présages. Si vous voulez vous libérer de ces foutaises, il faudra vous tourner vers la connaissance de soi. Vous verrez alors l'apparente réalité se désintégrer et vous arriverez enfin à la certitude que le Soi est la seule réalité !
Si vous cultivez la vertu dans cette vie, vous devrez vous réincarner pour jouir des fruits de cette pratique, de même que si vous vous adonnez au péché, il vous faudra aussi revenir pour en subir les conséquences. Il est impossible d'annihiler son karma sans la connaissance. Sans elle et sans le véritable maître, la libération est impossible. C'est pour cela qu'il est nécessaire de rester en compagnie des saints et de s'abandonner totalement au maître.
Quand l'analyse des principes est bien menée et que cette compréhension s'est établie en vous, vous existez alors sous la forme de « être-conscience-félicité » (Sat-Chit-Ananda).
Tout ce qui est fait sans la compréhension ne résultera qu'en renaissances ! Pour comprendre tout cela vous devez y réfléchir profondément. Celui qui pense est un homme, celui qui ne pense pas est un animal !
Pour que le principe final se révèle enfin, la théorie qui le précède doit être dépassée.
Les instructions préliminaires ont été développées afin que le chercheur comprenne la base de la recherche spirituelle. Écoutez l'enseignement du maître, analysez-le, réfléchissez-y profondément et automatiquement un désir intense pour la vérité se développera en vous. Finalement, vous aurez l'expérience « je suis le Soi ». Ainsi, les seules conditions requises pour la réalisation de soi sont l'écoute de la parole du maître (shravan) et une pensée bien concentrée qui se développe dans la bonne direction. Les sacrifices, les austérités, les jeûnes et les pèlerinages ne sont pas nécessaires. Vous êtes assuré d'atteindre la réalité finale si vous suivez les recommandations et l'enseignement du maître. Mais si vous n'écoutez pas, vous ne connaîtrez pas la délivrance. Ne vous embarrassez pas des austérités et des incantations, n'allez pas aux pèlerinages prônés par la religion, n'allez nulle part mais écoutez l'enseignement du maître ! Expérimentez par vous-même ce qu'il vous dit : « Voici le Soi, voici la conscience du je, voici le corps objectif, le corps subtil, causal, supra-causal ; vous devez expérimenter tout cela en vous et par vous-même, ou bien l'écoute n'aura aucun sens et n'aboutira qu'à un simple enregistrement. Examinez et analysez l'enseignement du maître car c'est cela qui vous conduira à la véritable compréhension. Vous devez acquérir cette connaissance en expérimentant par vous-même si ce que je dis est vrai ou faux !
L'ignorant sera alors transfiguré par la connaissance et les dieux du monde n'auront plus d'intérêt pour lui car il comprend désormais que ce n'est pas eux qui conduisent à la perfection. Celui qui a acquis la connaissance de lui-même a finalement pu briser les mailles du temps et retrouver sa vraie demeure.
L'ignorant a fait son temps dans le monde et, de ver de terre qu'il était, il a fini par devenir le père du monde, le père de Dieu !
Transfiguré par l'écoute attentive de la parole du maître, il est maintenant l'ultime réalité.
Dattâtreya
L'origine de la lignée « Navnath Sampradaya » fondée par Dattâtreya remonte à plus de mille ans. Maintenant cette lignée est devenue et s'appelle : « Inchegiri Navnath Sampradaya » fondée par Sri Bhausahed Maharaj.
Avadhûta gîtâ de Dattâtreya
Comment parler de matériel et d'immatériel ? Comment parler de passion et de détachement ? Immaculée, immuable, semblable au ciel, telle est ici-bas la forme innée de la réalité.
Comment ici-bas la trouver, et où ? Comment ici-bas trouver une forme sans forme ? Là où se trouve, hors de portée, le ciel, comment en faire ici-bas l'objet d'une perception ?
L'Âme universelle a la forme du ciel, l'Âme universelle est immaculée. Ainsi comment imaginer une division en servitude, liberté, changement ?
Tout est identique à l'unique réalité. Quelle fatuité de parler d'union et de séparation ! Ainsi tout est identique à la réalité suprême. Comment parler alors d'essentiel et de superflu ?
Tout est identique à l'unique réalité, aussi limpide que le ciel. Ainsi comment ici-bas soutenir qu'attachement-détachement soit vrai, qu'indifférence-passion soit vrai ?
C'est lorsqu'on n'est ni séparé ni uni que l'on est détaché. C'est lorsqu'on n'a ni perceptions ni absence de perceptions que l'on perçoit.