Le monde n'apparaît que lorsque les concepts s'élèvent et ne dure pas plus qu'eux
par Sri Siddharameshwar Maharaj

Source : Sri Siddharameshwar Maharaj « Embrasser l'immortalité (Amrut laya) » - Les Deux Océans – Paris



Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion.
Siddharameshwar Maharaj


Le Soi divin (Ishvara), une fois séparé de la réalité suprême (parabrahman) est appelé illusion primordiale. La connaissance est un concept très subtil, pouvoir et connaissance (prakriti/purusha ou Shiva/Shakti) sont une seule et même chose. Il est vrai que Dieu (la connaissance ou conscience) a créé le monde mais le monde n'existe que tant que votre corps, qui est éphémère, existe. Et Dieu n'existe que tant que le dévot existe. Tant que dure le rêve, le rêveur est là. Toutefois, la base de tout cela est la réalité où il n'y a rien. Dieu craint la destruction alors que le Soi suprême est sans peur aucune. Dans cet état sans état il n'y a ni dieu, ni homme, ni femme, ni ignorance, ni connaissance. Si Brahman (le Soi) et Parabrahman (le Soi suprême) étaient une seule et même chose, il n'y aurait nul besoin du préfixe « para » qui signifie « au-delà ».

Vivarta se réfère donc au sentiment de l'existence de quelque chose alors qu'il n'y a rien. Nous croyons qu'il y a quelque chose mais c'est le fruit de notre imagination. Le monde n'apparaît que lorsque les concepts s'élèvent et ne dure pas plus qu'eux. Le concept est la cause et le monde l'effet.

Dieu et le dévot sont liés car l'un ne peut exister sans l'autre. En fait Dieu n'existe que parce que le dévot l'a imaginé, et sans Dieu pas de dévot. Pour réaliser la vérité, connaissance et ignorance doivent être éradiquées.

Cinq voiles recouvrent votre véritable nature. Celle-ci est également différente des quatre corps, elle est la réalité qui est au-delà de tout. Le corps physique tire son existence de la nourriture, c'est pourquoi on l'appelle corps de nourriture. Les dix sens, les cinq souffles (prana) et l'intellect forment l'enveloppe du mental. Quand il n'y plus rien de tout cela, il reste l'ignorance qui est ici le corps de félicité (anandamaya kosha). Ce corps est fait d'oubli, et là ne réside ni souffrance ni bonheur. Pour qu'il puisse y avoir l'expérience de la joie, le jour et la nuit ont été créés. Si l'on n'a pas de repos, on ne peut expérimenter la joie. Le repos est joie, dans le sommeil un mendiant est aussi heureux qu'un roi.

L'ego de l'être humain est pris dans la toile que tissent ces voiles mais leur véritable propriétaire est au-delà d'eux. Transcender le néant signifie transcender la connaissance. La joie que procure l'état d'oubli (l'ignorance de l'état du sommeil) n'est pas véritablement éprouvée, alors que celle qu'apporte l'état de pleine conscience est expérimentée comme pure félicité. Cet état de pure conscience est appelé sat-chit-ananda, Om, Narayana, ou encore le Soi (Brahman) de la conscience profonde (pradnyana Brahman). Quand cet état aussi est dépassé, la sensation « je suis » disparaît, il ne reste alors que la réalité sans concept (vidgnyan). Cet état est la perfection, le Soi suprême et c'est votre état naturel.

Si le Soi était devenu le monde, il aurait subi un changement, et il pourrait même être connu dans le sommeil où les distinctions sont abolies. Mais ce n'est pas le cas car le Soi étant antérieur à tout, il ne peut être touché par ce qui se surimpose à lui. C'est par la suite que la connaissance, l'oubli, l'intellect, le mental et le corps apparaissent. Mais ce qui est à l'origine est le Soi suprême (Parabrahman). Le « je » s'est surimposé à lui. C'est dans la connaissance (conscience) que l'univers existe, elle est comme une parturiente qui accouche de l'illusion (le monde).

Ainsi, l'illusion a été créée par Dieu, c'est-à-dire par la connaissance (ou conscience), par le « je suis ». Dans l'état naturel l'illusion n'existe pas, mais elle est là potentiellement dans le pouvoir divin. Tant que la connaissance existe l'illusion paraît réelle. Si en rêve vous voyez un grand éléphant dans une petite casserole, vous direz que ce n'est pas réel, mais comment se fait-il alors que vous voyiez le monde entier, qui est si grand, par vos petits yeux ? Est-il réel ?

Ceci implique que tout ce que vous pouvez percevoir est faux.

Votre corps non plus n'est pas réel, considérez-le comme votre voisin, car le jour où ce voisin meurt dans un rêve, vous n'êtes nullement affecté.