La vie ici-bas doit être perçue comme un rêve issu du rêve de la pensée
par Sri Siddharameshwar Maharaj

Source : Sri Siddharameshwar Maharaj « Embrasser l'immortalité (Amrut laya) » - Les Deux Océans – Paris



COMPTE-RENDU N° 7

« La vie ici-bas doit être perçue comme un rêve issu du rêve de la pensée. La réflexion entre essentiel et non essentiel mène à cette compréhension ». (Dasbodb, D 6, S 10,05121)

« Celui qui est non né, qui n'a ni âge ni mort, sombra dans le sommeil ». Le Soi a été recouvert par l'ignorance, et dans cette tromperie une autre tromperie s'est glissée, celle de l'existence du monde. C'est un rêve dans un rêve. « Il s'est endormi » veut dire qu'il est devenu l'ignorant qui pense : « Je suis le corps, je suis untel ». Il était omniprésent et il est devenu insignifiant, c'est alors qu'il considéra le monde comme réel. Le monde est une illusion mais il apparaît vrai à l'ignorant. Finalement dans ce rêve il parvint à discerner la vertu du péché, le vrai du faux, le maître du disciple. C'est une grande chance, dans ce long rêve, que de réfléchir à ce qui est réel et à ce qui ne l'est pas, car les autres périssent dans ce rêve.

Le renoncement à toute richesse, le sentiment de détachement et le respect pour le sage sont autant de fruits d'un mérite antérieur et de la bonne fortune de chacun. Seul, un tel homme pensera à la sagesse. C'est extraordinaire d'éprouver une telle aspiration dans le rêve du rêve, d'autant que c'est à contre-courant. C'est comme rester totalement conscient alors que l'on a bu de l'alcool, ou bien rester équanime devant la fortune que l'on vient d'acquérir, généralement une source d'orgueil. Dans un rêve à l'intérieur d'un rêve, c'est une grande chance de rencontrer un maître et de pouvoir ainsi discerner le vrai du faux. Celui qui vit l'Expérience « je suis le Soi et tout le reste est faux » s'est réveillé de l'un des rêves. Puis, dans ce dernier rêve, il a encore réfléchi plus profondément pour parvenir à la conclusion qu'affirmer « je suis le Soi » était également faux. Le monde entier et tous les mots qui le composent sont illusion ! La vérité révélée, il est sereinement installé dans la béatitude. Il a totalement accompli « je suis le Soi », ce qui veut dire qu'il est complètement réveillé. Non seulement le mirage s'est évanoui, mais également le sentiment de l'expérience, le sentiment « j'ai expérimenté ». S'il dit avoir expérimenté le Soi, cela induit qu'il se croit différent du Soi.

Le véritable critère, c'est quand le Soi n'a pas le sens de lui-même.

Si la mangue dit : « Je trouve que je suis sucrée », elle n'est pas la mangue. De même si vous dites : « J'ai expérimenté », cela veut dire que le « je », l'ego, est toujours là. L'idée que « j'ai eu une expérience » est un leurre, de même le « je » de l'affirmation : « Je suis le Soi » ou « J'ai la connaissance », porte toujours la marque subtile de l'ego. Ce « je » doit disparaître et alors le Soi qui est antérieur à tout revient naturellement au premier plan. Quand vous enlevez l'épine du « je » vous transcendez l'illusion et devenez le Soi omnipénétrant. L'ego du « je suis le Soi » apparaît alors, mais il finira par se résorber car il n'y a rien d'autre que l'Un. Transcender le rien, c'est être dans la réalité sans concept (Para-Brahman).



COMPTE-RENDU N° 8

Les sages disent : « La Réalité est sans attributs et sans formes. La Réalité ne connaît ni le contact ni les différences. La Réalité n'a pas de limites. » (Dasbodh, D 7, S 2, 0 122)



L'essence des Védas réside dans la déclaration de votre identité avec le Soi ultime qui est au-delà des cinq voiles qui le recouvrent et des quatre corps de l'individu. Il y a de nombreuses méthodes pour expliquer les Védas dont le Soi est le principal objet. Le divin (Brahman) et la réalité (Para-Brahman) sont exposés de mille manières pour faciliter la compréhension et l'unification de l'être.

Le Soi est donc recouvert de cinq voiles :

1 - Le voile de la nourriture. C'est l'enveloppe extérieure, la protection du Soi. C'est le corps constitué de chair, de sang et d'os, etc., produit de la nourriture.

2 - Le voile des souffles vitaux. Le Soi est recouvert des cinq souffles vitaux (prana).

3 - Le voile du mental. Le mental et ses concepts.

4 - Le voile de la discrimination intellectuelle. Il établit les distinctions entre bien et mal, celui-ci et celui-là, la caste des guerriers (kshatriyas) et celle des prêtres (brahmanes) etc.

5 - Le voile de la félicité. Sommeil, repos et oubli. L'homme est heureux quand il oublie le monde, source de trouble pour lui.

La félicité c'est de tout oublier, l'homme est heureux quand il oublie ses souffrances. Ainsi, c'est dans l'oubli total que l'individu trouve le bonheur. Il est heureux dans le sommeil sans le savoir. Notre mental, comme Narada (un sage de la mythologie indienne qui symbolise le mental), voyage dans les trois mondes (grossier, subtil et causal), il chante les louanges du Seigneur mais continue quand même de s'impliquer dans les disputes et les batailles ! Il a toujours avec lui son bol à aumône dissimulé dans son sac de mendiant. Ce bol c'est son estomac, qu'il aille au bureau ou au temple, il est certain que monsieur « le mental » emporte son bol avec lui !

Voyez bien la nature des cinq voiles que nous avons décrits précédemment et surtout comprenez que le Soi est au-delà de tous les états.

Pas moins de trois cent trente millions de déités résident dans le corps ! Ces déités qui habitent la ville de Kashi (le corps) sont générées par l'ensemble des vingt cinq principes (tattva), des cinq voiles et des trois attributs (guna). Mais vous ne trouverez la déité qui règne sur cette ville, Vishwanath, qu'après avoir levé les cinq voiles. Votre nature est sans limites, ce qu'il y a dans le microcosme se trouve aussi dans le macrocosme. Cependant il faut déployer de multiples ruses pour vous prouver que votre véritable nature est le Soi suprême. Le monde des mots est le royaume de l'ignorant, ainsi tout ce qui est exprimé en mots ne peut servir que d'indication pour se diriger vers la réalité car les mots ne peuvent atteindre le Soi.

Quelle est la nature de Dieu ? Le divin a quatre corps dont le premier est l'immensité (virat) constitué des cinq éléments. Le corps subtil de l'immensité est le triple principe de création (Brahma), de conservation (Vishnou), de destruction (Mahesh/ Shiva), ainsi que les 330 millions de dieux. Ce corps subtil est dit « né de l'œuf d'or » (hiranya garbha). Puis le corps causal de Dieu est le non manifesté (avyakrut). Son corps supra-causal est l'illusion originelle du sat-chit-ananda (être, conscience, félicité).

L'individu a également quatre corps : les corps physique, subtil, causal et supra-causal. Le corps physique est produit par l'élément terre, il fait partie de l'immensité (virat). L'air qui circule à l'intérieur du corps et celui qui est à l'extérieur est le même. On ne peut donc prétendre que l'air nous appartient, il n'est ni à vous ni à moi car l'air est indivisible, il est le même pour tous. On peut décrire les différents niveaux de l'être mais pas sa véritable nature.

Le désir et les sens façonnent le mental. La déité du mental est la lune, et on dit qu'elle trahit le maître parce qu'elle refuse d'aller vers lui pour obtenir la connaissance de soi. La lune triche toujours. Les sens sont le domaine du Seigneur Indra à qui on fait des offrandes en vue d'obtenir apaisement et nourriture. Quand l'homme est bien nourri, ses sens sont apaisés, comme la terre soulagée après l'ondée peut prospérer. Gautam signifie le meilleur des sens (gau, sens ; tam, meilleur), il est l'époux d'Ahilya, le corps qui nourrit les sens. Ahilya révèle l'amour le meilleur, celui du divin, à Gautam (le meilleur des sens). Gautam et sa femme Ahilya poursuivent tous deux le même but, ils sont Un, comme jiva (l'individu conditionné) et Shiva (Dieu) ne sont qu'Un. Ainsi, l'ignorant n'est rien d'autre que le Soi.

L'homme et Dieu ont chacun quatre corps comme nous l'avons vu. Le huitième corps (Les 4 corps du jiva, individu et les 4 corps de Shiva, Dieu) ou l'origine de l'illusion, est stable, c'est le Soi divin (Brahman). Toutefois, le Soi suprême ((Para-Brahman) est au-delà du divin et ne peut être exprimé en mots.

Le Seigneur du monde transitoire est Ishvara, celui qui le vénère est aussi transitoire ; tous deux sont illusoires et périssables. Ainsi, l'homme et Dieu sont ignorance. Ne vous laissez pas leurrer par eux, car ils sont éphémères et voués à la destruction ! Le sage est celui qui comprend cela et le réalise, il est « celui qui sait » (Jnani).