Ce qui est antérieur à la conscience
est une paix sans fond,
seul Param-atman existe,
rien d'autre
par Sri Nisargadatta Maharaj

Source : « méditations avec Sri Nisargadatta Maharaj » - Éditions Aluna



Nirupana 20 - dimanche 2 avril 1978

À vrai dire, un individu n'a pas de forme. Ce que l'on appelle forme est constitué des cinq éléments. Dans le corps se trouvent les cinq sens. Auquel allez-vous continuer de vous identifier ?

La plupart des gens sont intéressés par ce qui concerne les perceptions sensorielles. Ils ne perçoivent pas le corps comme irréel. Tout le savoir du monde est basé sur les mots. Cherchez si celui qui possède ce savoir des mots a une forme. La contemplation de ce qui n'est pas le Soi n'est pas vraie. La méditation concerne uniquement le Soi. La connaissance dans le corps doit être trouvée. Elle n'est pas personnelle. Dans la bouche, le sucre fond mais sa douceur perdure. Est-ce que la douceur possède une individualité ? Il y a juste la trace d'une manifestation. C'est tout.

Aucune expérience ne dure. Celui qui expérimente ne peut pas être décrit, nous sommes celui qui expérimente. Ce qui dépend de la force vitale et de la conscience ne dure pas. L'éternel est avant ça. Nous devons regarder le concept « Je suis quelqu'un, je suis quelque chose ». Tout ce qui se manifeste, le fait en accord avec la nature du temps. Le désir d'atteindre la réalisation du Soi apparaît lui aussi conformément aux dictats du temps.

Quand la conscience apparaît, le monde devient visible. En grandissant, vous quittez l'enfance. De la même manière, en acquérant la connaissance juste, vous quittez l'identification à la forme corporelle.

Comme vous ne pouvez pas faire autrement que d'utiliser les mots, vous dites que Dieu est le créateur. Est-ce que le Dieu si bienveillant créerait un tel chaos ? Sans nous, Dieu n'existe pas. Dieu n'est rien d'autre que la certitude que vous avez d'exister, rien d'autre que l'amour que vous éprouvez pour votre existence.

« Je suis » est Brahman. Ce qui se tient derrière est appelé Para-brahman. Dans un premier temps, vous accédez à Brahman, ensuite vous et Brahman disparaissez (la conscience se déploie, se fond à l'univers tout entier, puis se dissout. Ceci se produit dans un état de profonde méditation). Ce qui fait dire au jnani qu'ultimement il n'y a rien. Alors pourquoi enseigne-t-il ? Voici une réponse : quand quelqu'un doit aller uriner, il y a urgence à le faire. Pendant que cela se fait, n'est-ce pas apprécié ? De la même manière, le corps du jnani est perçu temporairement, comme une envie pressante d'enseigner.

Le rêve premier est la sensation d'existence. Tant que vous vous référez à Dieu, vous n'avez pas atteint votre destination. Param-atman n'a ni naissance, ni mort. Alors pourquoi Krishna dit-il : « Je suis né tant de fois ? » Toutes ses naissances concernent les cinq éléments. De telles naissances se produisent par millions, chaque seconde, en Param-atman.

Les Écritures sont les concepts des poètes. Ils vous soudoient autant qu'ils vous menacent. Pendant le sommeil, il n'y a pas d'expérience de soi. Le sommeil ne peut pas être perçu une fois réveillé. Dans le même ordre d'idée, maya ne peut être imaginée. Tout comme le sommeil ne peut être connu, maya ne peut être connue, que ce soit des dieux ou des humains.

Maya apparaît lors de la manifestation de la conscience. Avant cela il n'y a pas de maya. La pensée « Je suis » est la perturbation. Même les plus grands dieux ne comprennent pas maya, car ils sont créés par elle. Ils ne sont pas auto créés. Leurs actes sont illusoires. Celui qui est détaché n'est pas concerné par maya. Le sommeil profond est synonyme de totale ignorance. C'est de là qu'émerge la sensation « Je suis ». C'est le commencement de maya. Alors, avec la sensation d'être réveillé, je m'en vais fièrement négocier mes affaires, dans un monde qui n'existe pas. La sensation « Je suis réveillé » crée le monde. Cela se produit par maya. Quand vous réalisez cela, la sensation « Je suis celui qui fait » s'évapore.

Quand vous saisissez le Soi, il l'est en tant que « vide vide », plus vide que ne peut l'être un rêve. La représentation de « Je suis comme ceci ou je suis comme cela » vous a donné forme. Ce qui a été créé, sera pour sûr détruit. Qu'est-ce qui est créé ? Notre conscience. Quand la sensation « Je » émerge, elle devient l'ego.

Vous ne pourrez pas écouter cela tant que vous n'êtes pas prêt. Une fois entendu, cela devra être rappelé et rappelé encore. C'est le commencement d'un processus. Cette forme vous est apparue spontanément. Personne ne l'a créée. Vous ne seriez pas ici, si vous n'aviez pas eu l'inspiration intérieure de chercher le sens profond de la vie. Ce n'est pas le genre de dévotion dont le propos est d'acquérir quelque chose. Le propos de cette dévotion est la libération par l'écoute. L'idée que vous êtes un homme ou une femme, avec les comportements qui vont avec, est fausse. Ce n'est qu'une apparence. Pour connaître cela, certaines qualités sont requises. La connaissance « Je suis » est votre Divinité. Comprenez cela. Différents noms Lui sont donnés. Le fait qu'un certain plaisir à écouter cela grandit en vous est, spirituellement parlant, un bon signe. Quand la connaissance de votre existence sera parfaitement claire, vous transcenderez maya. La conscience révélera alors sa propre valeur. La manifestation est une, mais ses noms sont multiples. Tous les noms sont ceux de maya. Une fois réellement connu « Je suis partout », le connaisseur ne sera plus différent de la connaissance. Aucune expérience ne dure. Quelle que soit la manière dont vous vous considérez, elle s'en ira. La sensation d'être réveillé est aussi un concept. Sommeil et veille sont des attributs de votre nature impermanente. Quand vous entrez dans le sommeil profond, vous vous débarrassez de vous chaque jour. Si ce sommeil ne s'arrête pas, qu'allez-vous faire ?

Que la mort arrive aujourd'hui ou dans un millier d'années, ce sera la fin de tout ; il n'y aura pas de problème. Le détachement est la sensation que tout ceci n'est qu'une apparence. Quand la Vérité est saisie, les faux concepts s'en vont. Aucun effort particulier n'est nécessaire pour cela. On appelle cela une offrande à Brahman.

Il est dit dans les Écritures : « Au juste moment, Bhagavan s'incarne et nourrit le dharma. » Il s'agit ici du dharma de notre vraie nature. Alors que quand les gens évoquent le dharma, il s'agit du dharma du corps. Le Guru est une incarnation de Dieu. Par la dévotion au Guru, maya, qui apparaît démoniaque et immense, est réduite à une taille infime. Ne négligez pas la conscience qui est en train d'écouter. Elle est pure et immaculée. Gardez cela présent et vénérez-le. Ne perdez pas cette connaissance du Soi dans la connaissance de votre existence. À cause des impuretés du mental, vous vous enfoncez dans les bois et subissez toutes sortes d'épreuves. Si ces impuretés sont retirées ici et maintenant, alors que vous écoutez, vous n'aurez pas à vous enfoncer dans les bois ou à gravir les montagnes.


Nirupana 25 - dimanche 23 avril 1978

Jetez loin tout concept tel que « J'ai acquis une grande valeur » ou « Je suis un grand pécheur ». Quelle est l'entité qui ressent cela ? La conscience identifiée ne lâchera pas sa prise sur vous, tant que seront présentes des pensées qui suggèrent que votre bien-être est le résultat d'une pratique spirituelle.

La seule chose que vous ayez à faire est de constamment être présent au Soi. Ne créez pas d'amitiés avec quoi que ce soit qui vous soit perceptible (ne laissez pas les choses du monde vous attirer). Si vous avez à agir, ne faites qu'une chose : satisfaire la conscience. Elle est très reconnaissante. Elle vous montrera directement tout ce qui EST. Vous réaliserez que l'immense manifestation n'a jamais existé. Vous êtes si microscopique que vous ne pouvez pas vous voir au travers de vos connaissances. Prenez les paroles du Guru pour autorité. Vous n'avez pas de corps. Ce qui est antérieur à la conscience est une paix sans fond. Rendez-vous à elle. Ne faites pas d'une félicité éternelle un objet. Vous êtes antérieur aux objets. Le moment de la mort est le plus empli de grâce. Il n'y a rien à gagner d'autre dans ce monde que la mort. L'ironie est que là où il y a la peur de la mort, juste à cet endroit, se trouve un océan de félicité.


Nirupana 26 - jeudi 27 avril 1978

L'univers entier se joue dans une unique cellule de votre corps subtil (la conscience-graine). Ce qui est vu avec vos yeux clos est le bleu nuit de l'Absolu. C'est l'ombre du corps subtil. Celui qui a une conscience identifiée ne peut pas comprendre ceci. Avant tout, vous devez atteindre la conscience divine par la méditation. Vous devez être convaincu que « Je ne suis pas un individu, je suis Dieu ». Par la transformation de l'intellect, l'ego disparaît. Tout ce qui est recherché est déjà à la Source. À cause d'une mauvaise compréhension, Cela se médite. Qu'est-ce qui a plus d'intérêt à être vénéré ? N'est-ce pas la connaissance « Je suis», votre conscience ? Seul Param-atman existe, rien d'autre.

Ce qui est appelé la naissance, est véritablement la naissance des trois gunas. Le cœur des gunas est sans dualité. Une lampe requiert de l'huile. De la même façon, la conscience présuppose l'existence de Param-atman. Tant que jiva a l'expérience de faire bien ou mal, il n'a pas atteint l'état de Param-atman. Votre conscience est l'essence de la douceur. Elle est la preuve de l'existence de Param-atman.

Que pouvez-vous faire par vous-même ? Pouvez-vous dormir ? Pouvez-vous vous réveiller ? Pouvez-vous déféquer ou uriner ? Alors, que vaut la fierté de se prendre pour l'acteur ? La force vitale avec ses trois gunas est elle-même l'indicatrice de Param-atman. À cause de maya, chaque jiva pense qu'il est responsable de ses actions dans le monde. C'est faux. L'enfance et la jeunesse sont venues et sont parties. Qu'est-ce qui reste de cela en tant que vous ? Est-ce que votre propre compagnie durera indéfiniment ? La raison de cette situation est maya. Quand, à travers votre propre expérience, vous aurez la preuve que le concept « Je suis le corps » est faux, vous connaîtrez la nature de Param-atman.

Je ne parle pas à votre corps. D'ailleurs, vous ne devriez pas non plus parler en tant que corps. Laissez le corps être. Veillez sur lui. Dès à présent, ayez connaissance de qui quittera le corps, maintenant que vous n'êtes plus le corps mais celui qui connaît le corps. Soyez totalement attentif. Soyez présent au fait que vous êtes la lumière, et ensuite agissez. La conscience est une lampe, la source de lumière. Voyez-vous le ciel grâce à cette lumière où êtes-vous vu à cause du ciel ? Discernez ceci. Rendez-vous à la Source qui est antérieure à l'espace.

Est-ce que votre vue est entachée ? Est-ce que l'espace à un quelconque trou en lui ? Est-ce que la vision de vos yeux n'est pas la vision du Soi lui-même ? Est-ce que cette lumière est mâle ou femelle ? C'est parce que vous l'utilisez avec le concept du corps, que la peur de mourir apparaît. Vous souhaitez et espérez tant de choses ! Mais pourquoi ne pas vous rendre à la Source ? Est-ce que quelqu'un a vu la lumière du Soi mourir ?

Vous devez entendre tout ceci du Sadguru. La libération vient de l'écoute. Elle ne peut pas être connue par les japas et les austérités. Quand les mots du Sadguru sont compris et retenus, la perfection arrive sans effort. Par le mantra qui vous a été donné, il vous a été demandé de vous ouvrir au Divin en vous. Vous êtes le Soi ; il n'est pas question de l'atteindre. La lumière du Soi est immaculée. il n'y a que lumière. Comment y trouver la mort ? Qui écoute maintenant ? Celui qui écoute est votre Soi. Quand la conscience s'oublie, il y a la paix. L'Absolu, bleu profond tel que vu les yeux fermés, est semblable à l'espace. Il n'y a pas d'interruption en Lui. il imprègne tout. Suivez avec dévotion ce que dit le Guru et vous réaliserez que vous êtes conscience. Quand l'ombre bleutée disparaît, reste le vide. C'est l'état d'être totalement témoin. C'est le quatrième état : « Je suis tout ce que je vois ». Votre conscience est le parfum de l'Absolu. L'Absolu contient un nombre infini d'univers.

Beaucoup de personnes peuvent avoir une conception intellectuelle de Brahman. Cependant, exceptionnellement, une sur des millions suit le Sadguru. Il n'y a pas de plus grande fortune que la connaissance du Soi. Vous avez commis une grande faute en vous appelant le corps. Alors, cet Absolu devient pour vous la fameuse mort dans vos derniers instants. Qui d'autre est là que Lui au moment de la mort ? Prenez votre décision, faites votre choix. Ne dépendez pas de l'avis des autres. Vous devez vénérer cette connaissance, qui arrive par l'écoute de la parole du Guru. Vous verrez une multitude d'univers se jouant dans votre conscience. Il n'y a pas d'autre déité derrière la connaissance du Soi. Il n'y a pas de plus grand malheur que de ne pas le réaliser. La connaissance du Soi est, elle-même, l'état de Param-atman, la demeure de la libération.

Si quelqu'un pose par écrit mes mots, et prend le temps de les mâcher, il atteindra l'état de Param-atman sans effort.