LA QUESTION DE LA MORT EST UNE FAUSSE QUESTION par Ranjit Maharaj

Source : « Je ne parle que de vous. » par Ranjit Maharaj – Les Deux Océans (Paris)



En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Sri Nisargadatta Maharaj


Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.

Siddharameshwar Maharaj


Lecture d'une lettre adressée à Maharaj :
« Mon fils de seize ans est mort l'année dernière dans un accident de moto. Je me sens désormais complètement perdue dans ce monde. Je cherche le sens de la vie,je veux trouver la paix, la sérénité. Je voudrais retrouver mon fils, peut-être en esprit, est-ce possible ? Pourquoi y a-t-il tant de souffrance dans ce monde ? Et pourquoi n'y a-t-il pas d'égalité entre les êtres ? Pourquoi mon fils est-il mort si jeune ? Il lui restait tant de choses à faire dans la vie. »

Maharaj : Une simple erreur a provoqué sa mort ; les erreurs arrivent. Pourquoi est-il mort ? La question n'a pas lieu d'être posée car on ne meurt pas, ce que vous êtes en réalité ne meurt jamais. La question de la mort est une fausse question. L'ignorant pense qu'il est né. Si vous êtes né, vous devez mourir. Naissance veut dire mort. Si quelqu'un pose la question : « pourquoi dois-je aller aux toilettes ? », on lui répondra : « parce que vous avez mangé. » Si vous mangez, vous devez aller aux toilettes. Pourquoi les gens sont-ils malheureux et pourquoi n'y a-t-il pas d'égalité entre les êtres ? Comment ce qui est irréel et imparfait pourrait-il vous rendre heureux ? Elle me demande pourquoi son fils est mort si jeune alors qu'il avait tant de choses à faire dans la vie. Si dans un rêve vous avez l'ambition et le désir de devenir le directeur d'une grande compagnie, ce désir disparaîtra au réveil. De même ici, les gens veulent faire une multitude de choses mais ils ne peuvent accomplir leurs désirs. Pourquoi ? Simplement parce que ce n'est pas réel, ce n'est pas vrai. Voilà le point essentiel. Il n'y a pas de perfection dans l'illusion car illusion veut dire « rien ». Tous ont des désirs différents et si tous les désirs étaient accomplis, comment le monde pourrait-il tourner ? Personne ne veut être pauvre mais la pauvreté existe, personne ne veut mourir, mais tout le monde meurt, c'est ainsi. Le monde est duel, il n'est pas parfait. Le mental est assailli par toutes sortes de désirs et de pensées, le problème, c'est que le désir concerne toujours ce qui est irréel. Le réel n'a rien à voir avec tous ces désirs et toutes ces peurs.

Vous dormez et faites un rêve mais quand vous vous réveillez, vous dites « ce n'était qu'un rêve », en fait il ne s'est rien passé. L'origine du monde, c'est le zéro, sa fin c'est le zéro, et tout ce que vous obtenez c'est zéro ! Elle dit qu'il y a beaucoup de choses à faire dans ce monde. Mais à quelle fin ? Quand vous donnez naissance à un enfant, il doit mourir tôt ou tard. Elle demande ensuite « puis-je le revoir ? » Cette pensée n'a pas de sens, car où est-il maintenant ? Il est devenu zéro ; le nom et la forme, c'est-à-dire ce qui n'existe pas, ont disparu. Si vous comprenez, la question de la mort ne se pose plus. Les gens ne comprennent pas parce qu'ils sont dans l'ignorance, d'où toutes ces questions. Personne ne veut mourir, mais le rêve est apparu et doit donc disparaître.

Ce monde n'est rien d'autre qu'un long rêve.

Ce qui n'existe pas ne pourra jamais être vrai même s'il vous paraît tangible à cause de votre corps physique et de vos sensations. Si par exemple quelqu'un vous donne une gifle dans un rêve, vous la ressentez fortement mais au réveil, vous réalisez qu'il ne s'est rien passé. Il ne s'est rien passé mais vous l'avez expérimenté à cause du rêve. Ainsi toutes ces questions n'ont pas de sens, elles n'en ont que pour l'ignorant. La racine de la naissance n'est que misère, alors comment son fruit pourrait-il être le bonheur ? La dualité est la cause de tout cela.

Il y a une histoire marathe à propos d'un homme pauvre qui s'appelait kachara, ce qui veut dire poussière, sans valeur. Quand il commença à s'enrichir, les gens se mirent à l'appeler Monsieur poussière. Puis, il fit fortune, et les gens l'appelèrent alors Maître poussière. « Quand je n'avais pas d'argent, on m'appelait poussière et maintenant que je suis riche, on me donne le titre honorable de maître poussière » remarqua-t-il. Il conclut que les gens faisaient honneur à son argent et non à lui. Quand la racine est amère, comment le fruit pourrait-il être doux ? C'est impossible. Tout le monde souhaite avoir une meilleure vie dans la prochaine incarnation et c'est ce désir même qui vous fait renaître encore et toujours. Vous voulez être quelqu'un de grand, mais comment pourriez-vous l'être quand ce désir qui s'incarne provient du zéro ? Un rêve est toujours irréel, il ne pourra jamais être vrai. Comment pourriez-vous revoir ce garçon, comment le reconnaître ? C'est un non-sens, il est devenu poussière. En fait personne ne meurt, les cinq éléments retournent aux cinq éléments et le pouvoir au pouvoir. Ce garçon n'est allé nulle part car de toutes façons il n'a jamais existé. Supposez que vous ayez un enfant dans un rêve, au réveil pleurez-vous sa disparition ? Cette belle fleur qui est là, aurez-vous envie de la contempler une fois fanée ?

Visiteur : Mais pourquoi souffrons-nous autant quand nos enfants meurent ?

Maharaj : C'est à cause de l'amour que vous avez pour l'illusion, pour ce qui n'est pas. Pourquoi souffrez-vous ? Parce que vous vous identifiez au corps. Mais moi je vous dis que vous n'êtes pas le corps, le corps est une enveloppe qui vous recouvre et vous limite. Pour deux ou trois minutes de plaisir, vous concevez un enfant qui souffrira toute sa vie. Personne ne meurt pour vous et à votre mort vous devenez poussière. Le Christ a dit : « Poussière tu es, poussière tu retourneras ». Le corps n'est que poussière. C'est le souffle qui maintient le corps en vie et quand il s'épuise le corps disparaît sans même vous dire au revoir ou merci d'ailleurs.

Un sage qui venait de perdre son fils déclara : « Tant de gens meurent dans le monde chaque jour, pourquoi donc devrais-je pleurer pour un seul d'entre eux ? » Vous pleurez parce que vous dites : « c'est mon enfant ». Seul celui qui comprend qu'il n'est pas le corps est heureux. Dès que vous vous identifiez au corps, l'ego surgit. Le corps n'est rien d'autre que chair, sang et os, mais vous l'aimez parce que son enveloppe a une belle finition. Dire « je suis le corps », c'est ça l'ignorance. Si vous avez un balluchon de dix kilos et que vous en dispersez le contenu, que devient votre balluchon ? De même, ce corps n'est qu'un balluchon d'air, de chair, de sang et d'os. Vos parents lui donnent un nom, mais qu'est-ce qu'un nom ? Il n'a aucune réalité. Si vous brisez ce vase, il redevient de la terre. Les noms ne sont donnés que par commodité.

Naissance et mort ne sont que vos concepts. Si la personne qui vous est la plus chère venait à mourir, votre entourage pourrait vous dire : « tu l'aimais tant, pourquoi ne la gardes-tu pas à tes côtés quelques jours de plus ? » Vous répondrez à coup sûr : « non, non, enterrez-la tout de suite, je ne veux plus la voir ! » Personne ne veut rester en compagnie d'un cadavre. La seule solution à la mort, c'est l'oubli. Il y a une multitude de bulles à la surface de l'océan, est-ce que l'océan pleure quand l'une d'elle éclate ? Pourquoi les sages ne pleurent-ils pas ? Parce qu'ils sont devenus l'océan, ils sont devenus « cela », alors pourquoi s'inquiéter pour une bulle ?

Visiteur : y a-t-il quelque chose de vrai ? Comme par exemple le fait d'être avec vous ?

Maharaj : Non, rien n'est vrai, car tout vient de l'ignorance. C'est l'ignorance qui vous fait dire que je suis le maître et vous le disciple, alors qu'en fait, la réalité est vous-même. A cause de votre identification au corps-mental, vous croyez que vous ne savez rien et vous allez donc écouter le maître. Mais c'est encore un rêve car tout ce que je dis est faux également, mais celui de qui je parle est vrai. Tout comme l'adresse est inutile une fois que vous avez trouvé la personne recherchée, l'enseignement est irréel une fois que vous vous êtes retrouvé. Dans l'état sans état, il n'y a pas de mots. Les mots ne peuvent pas l'atteindre, ils butent et nous reviennent. Le symbole de la flèche qui vous désigne la direction des toilettes, par exemple, n'est pas l'endroit lui-même ; ce n'est qu'une indication. Vous pouvez comprendre par les mots, mais ils ne sont plus vrais lorsque vous avez atteint la destination. Ainsi tout ce que je vous dis est faux, mais ce dont je parle est vrai.

Vous êtes Elle, la réalité absolue, vous sans le « vous »,

le sentiment de séparation n'est dû qu'à votre identification au corps-mental.

Vous vous identifiez à cette petite bulle ; c'est le mental qui vous a rendu si petit. Il est donc nécessaire que votre pensée s'ouvre, que vous deveniez de plus en plus grand jusqu'à ce que le ballon explose et c'est alors que vous deviendrez la réalité. Cassez les murs de votre mental et devenez l'espace !

La seule chose qui vous limite, ce sont vos concepts, c'est pour cela que le maître doit transformer votre pensée.

Vous n'êtes pas le corps, vous êtes le pouvoir :
c'est cela que vous devez méditer profondément,
et alors la compréhension s'établira en vous.

Tous les gens aiment se regarder en photo quelle que soit leur apparence. Mais la photo n'est pas vous, elle n'est qu'un reflet de la réalité. Si vous vous concentrez sur le reflet, vous ne pouvez pas voir le réel. Oubliez le reflet et vous êtes la réalité.

Rien ne se passe et ne se passera jamais même si vous pensez le contraire.
Dites-vous bien que c'est un rêve.

Les yeux ne voient toujours que ce qui n'existe pas. C'est ainsi.

En ce moment même, ce corps n'est qu'un cadavre, il ne parle que parce qu'il est connecté au pouvoir. Quand l'ampoule est grillée, vous la remplacez tout simplement, mais cela ne change rien au pouvoir. Quant à la femme qui a perdu son enfant, ne l'oublie-t-elle pas quand elle dort ? A cause des fausses notions que vous avez à l'esprit, vous croyez qu'il vous appartient et donc vous souffrez.

Loin du maître, vous vous rappelez de certaines choses et vous en oubliez d'autres, mais n'oubliez surtout pas que tout n'est rien. Le maître non plus n'est pas le corps, vous devez ressasser ses paroles afin de ne pas les oublier. Mettez cela en pratique où que vous soyez, réfléchissez-y constamment.

La réalité est omniprésente et c'est ce que vous êtes.

N'êtes-vous pas heureux lorsque vous dormez et que vous oubliez tout ? Oubliez que vous êtes américain, indien ou autre. Comprendre c'est pratiquer que tout est zéro, que tout est illusion. Pour se connaître soi-même, combien de temps faut-il ? En ce moment même, vous êtes la réalité, rien de ce que vous voyez et percevez n'est vrai. Tout dépend de votre mental et de la façon dont vous acceptez ce qui est dit. Le maître fait tout ce que vous faites : il mange, il dort mais la différence c'est que son mental a été transformé ; bonnes ou mauvaises pensées peuvent survenir, mais alors il ne ressent rien parce que ce n'est rien.

Ce n'est pas parce qu'il porte des guenilles que l'homme riche deviendra pauvre. Si vous connaissez votre propre richesse, qu'importe ce que disent les autres. Sachez que vous êtes le créateur du monde. Ouvrez votre mental afin qu'il devienne de plus en plus vaste car c'est ainsi qu'il finira par disparaître. Ce qui restera c'est la réalité. Vous ne serez plus alors concerné par le fait d'agir ou de ne pas agir. La base de la compréhension c'est que bien que j'agisse, je n'agis pas. Le roi donne les ordres et ses sujets les exécutent, à lui le plaisir, aux autres le travail. Ne soyez pas petit, ne dites pas que tout est réel ; c'est l'erreur que tout le monde fait. Acceptez ce que dit le maître et votre mental sera toujours en paix. Ne soyez pas esclave de l'illusion, ne lui accordez pas de valeur. Ainsi, rien ne pourra vous affecter. S'il dit qu'il est Bob, il est perdu mais s'il dit l'inverse, il est le créateur du monde. D'un jour à l'autre le mendiant peut devenir roi. Si vous dites que tout est vrai, vous êtes l'esclave, si vous dites que tout est faux, vous êtes le roi. Soyez le roi, pas l'esclave !

Bombay - 9 Janvier 1998





TAD NISKALA (Ce que je ne suis pas) par Shankaracharya


Om, je ne suis pas le témoin, l’intelligence, l’ego ni le mental, ni les oreilles ni la langue, ni les sens de l’odorat et de la vue, ni l’éther ni l’air.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !


Je ne suis ni le prana ni les cinq souffles essentiels, ni les sept éléments du corps, ni ses cinq gaines, ni les mains, ni les pieds, ni la langue, ni l’action d’aucun membre.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !


Pas de peur, d'avarice ou d'ignorance, pas de préférence, aucune fierté ni ego, ni dharma ou Libération, je ne suis ni le désir ni l’objet du désir.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !


Je ne connais ni plaisir ni haine, ni vertu ni vice, ni mantra ni espace sacré, pas de Védas ni de sacrifice. Je ne suis ni le mangeur ni la nourriture ni l’acte de manger.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !


Je ne connais ni la peur, ni la mort, ni différence de caste, ni père, ni mère, pas de naissance, ni ami, ni camarade, ni disciple, ni gourou.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !


Je n’ai ni forme ni besoin, omniprésent j’existe partout, pourtant je suis au-delà des sens, je ne suis ni le salut ni quelque chose de connaissable.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !