« J'EXISTE » EST LE BOULET QUI VOUS ASSERVIT par Ranjit Maharaj
Source : « Je ne parle que de vous. » par Ranjit Maharaj – Les Deux Océans (Paris)
En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Sri Nisargadatta Maharaj
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Siddharameshwar Maharaj
Visiteur : Aujourd'hui, c'est mon dernier jour ici. Je sais que je devrais ressentir votre présence même lorsque je suis loin de vous, mais je me sens mieux en votre compagnie. Comment combler ce vide, effacer la distance ?
Maharaj :
Il n'y a ni temps ni distance. La réalité est partout et en tout.
N'oubliez pas cela, c'est essentiel. Vous êtes la réalité et vous êtes toujours Elle, alors, où est le problème ? Il est seulement dans le fait que vous ignorez ce que vous êtes.
Vous devriez pratiquer ceci :
« je suis partout, et rien d'autre n'existe ».
Il n'y a que l'unité, donc ce que vous voyez et percevez est la réalité également.
Quand vous vous regardez dans un miroir, c'est votre reflet que vous voyez. L'ignorance, c'est de prendre le reflet pour la réalité. Le reflet n'est rien, mais puisque cette apparence est vraie pour vous, vous devenez « quelque chose ». Vous devenez le nom que l'on vous a donné.
Ainsi, c'est seulement parce que vous vous êtes oublié que vous devez suivre le maître, sinon il n'y en aurait nul besoin. Le corps est ego et vous êtes devenu l'ego, mais en fait il n'a aucune réalité. Trouvez qui est Dieu ou qui « je suis ». Vous ne pouvez pas trouver Dieu, alors trouvez qui vous êtes.
Vous devez dissoudre ce « je » qui de toutes façons n'existe pas. Si vous ne le supprimez pas, la dualité persistera : vous et Dieu, et tant que la dualité est là, le véritable bonheur est impossible. Même avec vos meilleurs amis, les différends et les tensions surviennent mais quand il n'y a que l'unité, il ne peut plus y avoir de tensions.
Seule la réalité reste quand le « je » disparaît.
Elle est si subtile, bien plus subtile que l'espace.
L'espace est le point zéro et la réalité est au-delà de l'espace, alors comment pourriez-vous la voir ?
Qui la verrait, et avec quels instruments ?
Le maître peut vous donner la compréhension uniquement par le biais des mots, mais les mots ne sont que des indications. « J'existe » est le boulet qui vous asservit, puisque vous devenez « quelque chose ». Vous êtes convaincu d'être quelque chose, mais en fait, rien ne peut vous aliéner. Tout ce que vous voyez et percevez est la réalité quand vous expérimentez cette unité. C'est la dualité qui sème la confusion en vous. La première étape est donc de savoir « qui je suis ». Vous n'êtes rien, mais vous répétez inlassablement : je suis ceci, cela ... Pouvez-vous me donner un échantillon de vous-même ? Vous dites : « je suis ici », mais le maître vous dit : « vous n'êtes nulle part ».
Vous affirmez toutes sortes de choses, alors que celui qui parle n'existe pas.
C'est ainsi que vous êtes devenu un démon, tel Ravana le démon du Ramayana (épopée d'essence spirituelle attribuée au sage Valmiki et qui relate la vie du Seigneur Rama - le Soi). Une goutte du sang de Ravana crée un nouveau démon. Vous êtes devenu le démon Ravana. Tout a surgi de vos pensées. Dans l'histoire, Rama (le Soi) n'a pas pu tuer Ravana, car il n'a jamais existé. Rama lui-même est devenu Ravana, alors comment pourrait-il le tuer ? Comprenez donc ! Comment peut-on tuer quelqu'un qui n'existe pas ? Hanuman était le bras droit de Rama, c'était un singe, symbole du mental. Si vous donnez une échelle à un singe, il montera et descendra inlassablement jusqu'à ce que quelque chose d'autre capte son attention. Le mental est à l'image du singe : tout au long du jour vous pensez à une multitude de choses pour les oublier ensuite. Les Écritures ont recours aux images pour faciliter la compréhension, ce ne sont pas que des histoires. Vous vous êtes oublié, et vous vous agitez sans cesse dans ce monde à seule fin de vous remplir le ventre. Ainsi, Rama (le Soi) a lui-même créé de nombreux démons. Par vos yeux, vos oreilles, votre goût et par vos pensées, vous créez tant de désirs, « je veux » dites-vous sans cesse. Demandez donc à votre mental ce qu'il ne veut pas ; il veut tout ! Le mental n'est rien d'autre que vos pensées et c'est en fonction d'elles que vous déclarez telle chose bonne ou mauvaise. La seule chose qui soit mauvaise, c'est le concept du « je », mais en fait, même cela n'existe pas, Ne soyez donc pas un singe ! Vous faites la même chose que lui, mais d'une manière un peu plus sophistiquée, c'est tout.
Quand vient la compréhension, il n'y a plus ni bien ni mal. C'est par ignorance que vous croyez être né et que vous devrez mourir. C'est le corps qui meurt, vous, vous ne mourez jamais. Alors, pourquoi vous inquiéter ? Tout le monde a peur de la mort, personne ne veut mourir, l'ego refuse de disparaître. Ne vous inquiétez de rien car vous êtes toujours avec le maître, jamais vous n'en êtes séparé. Puisque vous êtes persuadé que tout est vrai, alors vous devez pratiquer l'inverse, c'est-à-dire : rien n'est vrai, y compris moi-même. « Je n'existe pas ». La maison ne dit pas « je suis une maison », le pot de fleurs ne dit pas « je suis un pot ». Vous attribuez des noms à tout et à tous et c'est pour cela que vous êtes des démons. Des multitudes de démons naissent de vous-même, alors comment pourriez-vous trouver le bonheur ?
Ravana, c'est-à-dire l'ego, doit être terrassé par Rama, le Soi. Tant que vous dites « je suis », le démon est là. Il n'existe pourtant que dans votre pensée. Mais si vous n'existez plus, le démon non plus.
« je suis en tout et partout »,
c'est cela que vous devez comprendre.
En fin de compte ni la foi ni la pratique ne sont nécessaires car de toute façon vous êtes la réalité en ce moment même. Que dire de plus ? Le maître dit toutes ces choses parce que vous vous êtes oublié, il vous donne l'adresse, à vous de prendre le chemin pour atteindre le but.
La réalité ne meurt jamais, elle n'est jamais née, elle n'apparaît ni ne disparaît jamais. Elle est immuable.
L'aliénation et la libération n'existent pas, elles ne sont que des états, des concepts.
Il y a une coutume en Inde qui veut que lorsque la femme meurt, son mari doit se couper la moustache. Ainsi tout le monde sait que sa femme est morte. En fait, il ne s'est rien passé, personne n'est mort, vous pleurez la perte de « rien ». Quand vous êtes la réalité, il n'est plus question de deuil. Même les scientifiques disent que la matière ne meurt jamais. J'ai prononcé tellement de mots, où sont-ils maintenant, où ont-ils disparu ? Où sont partis tous les gens qui sont morts ? Sont-ils dans la tombe ? Vous désirez être enterré près de votre mari ou de votre femme après la mort, mais tous ces vœux sont des non-sens. Où pouvez-vous trouvez quelqu'un ou quelque chose, quand rien n'existe ? Si vous allez au marché pour vendre votre « je », personne ne l'achètera car il n'existe pas. Le fils d'une femme stérile n'existe pas. Ce corps n'est rien d'autre que l'enfant de la femme stérile. Vous pouvez bien avoir cent ans mais vous n'êtes jamais vieux, vous êtes toujours neuf dans votre véritable nature. Vous n'êtes jamais séparé puisque en tant que réalité, vous êtes partout. Il n' y a donc pas de séparation, celle-ci ne s'applique qu'au corps. Je dois répéter toutes ces choses encore et encore parce que vous avez oublié que vous êtes la réalité.
Un visiteur occidental rentre dans la pièce. Il se présente en donnant son nom initiatique mais Maharaj lui demande son nom d'origine.
Maharaj : Les deux noms sont faux, pourquoi les maîtres en rajoutent-ils ? Nul besoin car un nom est bien suffisant. Les noms ne sont que des noms, c'est-à-dire rien. Le fait d'en avoir deux sème encore plus la confusion. Vous êtes la réalité ultime, vous êtes sans nom, sans concept. Les noms n'ont aucune valeur. Avant de naître, aviez-vous un nom ? Vous donnez des noms à ce qui n'existe pas.
Bombay - 16 janvier 1998
TAD NISKALA (Ce que je ne suis pas) par Shankaracharya
Om, je ne suis pas le témoin, l’intelligence, l’ego ni le mental, ni les oreilles ni la langue, ni les sens de l’odorat et de la vue, ni l’éther ni l’air.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne suis ni le prana ni les cinq souffles essentiels, ni les sept éléments du corps, ni ses cinq gaines, ni les mains, ni les pieds, ni la langue, ni l’action d’aucun membre.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Pas de peur, d'avarice ou d'ignorance, pas de préférence, aucune fierté ni ego, ni dharma ou Libération, je ne suis ni le désir ni l’objet du désir.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni plaisir ni haine, ni vertu ni vice, ni mantra ni espace sacré, pas de Védas ni de sacrifice. Je ne suis ni le mangeur ni la nourriture ni l’acte de manger.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni la peur, ni la mort, ni différence de caste, ni père, ni mère, pas de naissance, ni ami, ni camarade, ni disciple, ni gourou.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je n’ai ni forme ni besoin, omniprésent j’existe partout, pourtant je suis au-delà des sens, je ne suis ni le salut ni quelque chose de connaissable.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !