CONSIDÉREZ VOTRE CORPS
COMME VOTRE VOISIN
par Ranjit Maharaj
Source : « Je ne parle que de vous. » par Ranjit Maharaj – Les Deux Océans (Paris)
En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Sri Nisargadatta Maharaj
Au niveau ultime la Présence est dissoute. vous ne serez pas conscient quand la Présence devient Omniprésence.
Tout est Un. Il n'y a pas d'individualité.
Shri Ramakant Maharaj
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Siddharameshwar Maharaj
Visiteur : La souffrance physique peut-elle nous aider à comprendre plus vite que nous ne sommes pas le corps ?
Maharaj : Par la souffrance physique on peut en effet, comprendre plus vite. Swami Ramdas a dit qu'il y avait trois sortes de souffrances : la première est la conséquence de votre identification au corps qui vous fait endurer la maladie et la douleur. La seconde provient du monde extérieur où vous êtes confronté à toutes sortes de difficultés. La troisième est la souffrance que vous subissez lors de votre mort si vous mourez dans l'ignorance ; c'est le tourment que Dieu vous inflige. Celui qui est frappé par ces trois malheurs s'interroge : comment puis-je atteindre le bonheur ? Et il se tourne alors vers la réalité.
Quand on a un corps, on est inévitablement confronté aux problèmes physiques, qu'il s'agisse de maladies héréditaires ou non. Ce sont les problèmes inhérents au corps. Puis il y a les problèmes causés par le monde extérieur, comme les accidents par exemple. La peur de mourir que vous éprouvez alors, vous perturbe psychiquement. Le monde est ici la cause du tourment que votre mental subit. Si votre enfant meurt, vous souffrez terriblement, parce que vous dites : « c'est mon enfant ». Si le fils du voisin meurt, vous êtes désolé mais votre douleur n'est pas aussi profonde. La roue de la souffrance tourne dès que vous dites : « cela m'appartient. » Tout vient donc de votre mental qui est le lien avec le monde. Par votre propre désir, vous montez en selle et ensuite vous devez suivre les mouvements du cheval et bien tenir les rênes pour ne pas tomber. Vous devez vous plier au rythme du cheval. C'est ainsi.
Pour celui qui en est affligé, ces trois souffrances peuvent être véritablement une chance de se diriger vers la réalité. Même si ces difficultés sont pénibles à surmonter, votre motivation pour trouver la voie est aiguisée. Les problèmes physiques sont une aide pour vous. Il arrive un moment où, assailli par les souffrances physiques et mentales, vous êtes dégoûté de ce corps et c'est là une chance qui s'offre à vous. Mais si vous ne comprenez pas, vous êtes écrasé par ces problèmes que vous considérez comme réels, puisque vous êtes persuadé d'être le corps. Dès que vous vous identifiez au corps, il vous arrive tous les malheurs du monde. Si vous comprenez que vous n'êtes pas cela, tout s'efface pour vous. Vous pouvez comprendre si vous rencontrez le véritable maître. Je vous assure que vous pouvez alors être heureux, même si vous êtes très malade. Considérez donc votre corps comme votre voisin et non pas vous-même. Quand vous vous identifiez au corps, l'ego apparaît automatiquement et cet ego ne veut pas de problèmes, il ne veut que le positif pour lui : « mon nom doit être reconnu » etc. L'ego se renforce par le bonheur que vous obtenez des choses du monde. Si le malheur et la misère vous échoient, sachez que c'est pour votre bien. C'est ainsi qu'un sage accueille la maladie, car il sait qu'il n'est pas ce corps.
Le bonheur éphémère n'est pas le véritable bonheur. Celui-ci réside dans le fait d'oublier le monde. Quand vous dormez, vous oubliez le monde et vous êtes en paix. La vie dans le monde vous enchaîne et c'est ça que vous prenez pour la réalité mais si vous comprenez que ce n'est pas réel, alors vous êtes libre à jamais. Laissez toutes les choses qui concernent le corps se produire, pourquoi vous tourmenter ? Quand l'enfant est malade, sa mère s'inquiète, mais peut-elle prendre son mal sur elle ? Elle le rassure par les mots, c'est tout. Vous aimez bien avoir des visites quand vous êtes malade, mais à quoi bon.si c'est pour parler encore plus de votre maladie ? Vous ne voyez toujours que votre propre intérêt, l'intérêt de votre petite personne. Oubliez tout ça. Tout le monde est d'accord pour dire que le corps est transitoire mais moi je vais plus loin et vous affirme qu'il est déjà mort, même si cela vous paraît inacceptable.
Vous êtes si ouvert en vous-même. La réalité n'est pas affectée par le bonheur ou le malheur. Peu importe ce qui se passe, je suis inébranlable, comme le rocher dans la tempête. C'est ainsi que tous vos tourments pourront disparaître et que la compréhension s'établira rapidement en vous. Soyez sans peur. Quels que soient les plaisirs et le bonheur dont vous jouissez, ne vous y attachez pas. L'attachement est ce qui doit être éradiqué en vous. Si vous êtes un roi, prenez place sur le trône et régnez, mais comprenez que ce n'est pas réel. Il y avait un roi que l'on appelait Videhi, c'est-à-dire « sans corps », bien qu'il était vivant. Cela signifie qu'il était toujours en lui-même. Ainsi vous pouvez être incarné tout en ayant transcendé le corps. Le corps, est toujours là mais on l'appelle malgré tout « sans corps », libéré du corps (Videhi Mukti). Le corps est l'asservissement mais dès que vous comprenez que vous n'êtes pas cela, vous êtes libre, vous êtes alors le pouvoir qui est en vous et partout. Ce pouvoir est ouvert et limpide, il vous rend toujours heureux et sans crainte. Ne vous oubliez jamais, même dans le bonheur, peu importe ce que vous faites, ne vous oubliez jamais.
Un jour, le sage Shukamuni, rendit visite au roi Janaka. Shukamuni était un yogi et il savait que le roi était réalisé. Prévenu de sa visite, le roi lui fit délivrer ce message : « détache-toi de tout et sois satisfait en toi-même ». Shukamuni rentra chez lui. Il médita les paroles du roi et décida alors de jeter toutes ses possessions et jusqu'à son pagne. Puis il retourna au palais entièrement nu. Janaka lui dit à nouveau d'abandonner tout attachement : « Vous n'êtes ni le corps, ni un yogi, ni un sage, ni un renonçant. » ajouta-t-il. Shukamuni quitta le palais et ne revint plus jamais. Il avait compris le sens profond des paroles du roi sur l'attachement qui est toujours présent chez le renonçant. L'attachement est ce qu'il y a de pire car il s'agit d'un attachement à ce qui est faux. Soyez attaché à la réalité et vous serez la réalité elle-même. Lorsque vous êtes confronté aux tourments du monde, dites-vous que c'est pour votre bien. Ainsi vous finirez par prendre ce corps en aversion et vous serez sur la bonne voie. Ne jugez rien comme étant mauvais ; en fait, la seule chose qui est mauvaise c'est de vous identifier au corps. Quand vient la vieillesse, vous avez besoin d'aide car vous sentez que votre pouvoir d'action diminue mais comprenez donc que vous n'êtes pas ce corps mais le pouvoir qui est en vous et qui vous a donné la vie. Tous ces tourments vous affectent parce que vous êtes ancrés dans la dualité. Si le « je » est là, le « vous » est là aussi. Qui pourrait bien exister quand vous, vous n'existez pas ? Quand vous comprenez cela, l'unité emplit votre esprit. Les problèmes surviendront toujours mais vous ne leur accorderez plus d'importance.
Dès que vous comprenez que vous n'êtes pas le corps,
vous êtes la réalité.
Vous êtes tous préoccupés par le corps et vous craignez la mort, mais ici c'est à vous-même que vous devez mourir alors que vous êtes toujours en vie, et ce par la compréhension. Dès que vous comprenez que vous n'êtes pas le corps, vous êtes la réalité. Si vous perdez une jambe, vous êtes infirme, mais pourquoi s'inquiéter puisque vous n'êtes pas l'infirme, vous êtes la réalité. Lorsque vous comprenez ce que dit le maître, c'est-à-dire que vous n'êtes ni le corps ni le nom, et que tout ce qui se passe c'est pour le mieux, alors vous êtes libre à jamais.
Un jour, un roi se coupa le doigt et son docteur lui fit un beau pansement. Lorsque le roi montra son pansement à son conseiller, ce dernier s'exclama : « tout ce qui se passe est pour le mieux ». Fort surpris, le roi rétorqua : « Ah ! Ceci est pour le mieux, jetez-le donc en prison et nous allons voir ! » Quelques jours plus tard, le roi s'en alla à la chasse et fut capturé par des indigènes, amateurs de sacrifices humains. Remarquant la blessure du roi, ils décidèrent de ne pas le sacrifier à leur dieu car on ne pouvait pas lui donner quelque chose d'imparfait. Le roi eut donc la vie sauve, et se dit en lui-même que le conseiller avait raison : grâce à son doigt coupé, il était resté en vie. Il rentra chez lui et décida de rendre visite à son conseiller. « Bon ! » dit le roi à ce dernier : « je suis d'accord avec toi, cette coupure était pour le mieux en ce qui me concerne, mais toi tu es en prison depuis plus d'une semaine, est-ce aussi pour le mieux ? » Le conseiller répliqua : « si je n'avais pas été en prison, je t'aurais accompagné à la chasse et c'est sans doute moi qui aurait été sacrifié à ta place. »
Quand vous oubliez votre « je », tout et tous sont vôtres mais dès que vous dites : « je suis ceci ou cela », vous devenez une petite créature en souffrance. Le corps doit mourir un jour, alors, comment pouvez-vous être cela ? Vous pensez que la mort c'est pour demain, mais pourquoi ne pas mourir à vous-même dès aujourd'hui ? Oubliez tout, oubliez le corps, oubliez votre ego et vous serez heureux. Quand vous dormez, vous oubliez bien votre corps, n'êtes-vous pas heureux ? D'où émane cette fraîcheur que vous ressentez au réveil, si ce n'est de vous-même ? Il y a un adage en marathi qui dit que quand la bonne fortune vous sourit, vous pensez immédiatement à vous rendre chez le bijoutier, mais dès que le malheur vous accable, vous vous tournez aussitôt vers Dieu : « O Seigneur, viens à mon secours ! » Moi, je vous dis que c'est une malchance que de ne pas avoir de problèmes.
L'ego est le plus grand fauteur de troubles, il doit disparaître pour que la réalité s'ouvre enfin. Saint Toukaram disait : « J'ai donné à Dieu toute mes richesses car elles ne m'appartenaient pas et je lui rends aussi le corps qu'il m'a donné. Qu'est-ce qui est à moi maintenant ? Rien ». Quand il n'y a rien, que reste-t-il ? Vous, sans le « je », c'est-à-dire la réalité.
Oubliez tout et vous êtes la réalité,
tant que vous êtes là, elle ne peut être.
Visiteur : Pouvez-vous nous expliquer ce qu'est la conviction ?
Maharaj : La conviction, c'est la compréhension profonde que je ne suis pas le corps. Qui suis-je alors ? Je suis le pouvoir qui réside dans le corps mais le pouvoir lui-même finit par disparaître. Vous devez d'abord acquérir cette connaissance pour vous en débarrasser ensuite. La conviction, c'est la certitude que ce monde n'est pas réel.
Visiteur : La conviction est-elle encore un concept ?
Maharaj : Elle est encore un concept mais c'est un concept très fort. Oubliez tout et vous êtes la réalité, tant que vous êtes là, elle ne peut être. Quand elle est là, vous n'êtes pas, les deux ne peuvent coexister. Soit vous êtes, soit elle est. Si vous vous identifiez à l'ego, la réalité se tait, pourtant l'ego ne peut rien faire sans elle. Soyez, tout simplement et oubliez ceci et cela, oubliez l'ego et vous êtes ; c'est cela la conviction. Tous ces concepts viennent de la connaissance et la connaissance n'est pas réelle. Toutes les choses du monde, les pensées et les rapports humains sont là parce que vous avez un corps. Aussi quand vous affirmez que vous n'êtes pas le corps, ces rapports disparaissent. Vous venez seul au monde, et vous mourez seul. Personne ne vous accompagne. Lorsque quelqu'un meurt, les gens disent que c'est la volonté de Dieu et ils pleurent, mais pourtant personne ne part avec le défunt. Comment cela serait-il possible ? Il ne va nulle part. Les cinq éléments retournent aux cinq éléments, et le pouvoir retourne au pouvoir, mais sachez que le pouvoir lui-même n'est pas réel. Alors que reste-t-il ? Il ne reste que le désir d'avoir un autre corps. C'est pour cela que vous reprenez naissance. L'ego veut toujours se réincarner, il veut renaître pour trouver le bonheur qu'il recherche à tout prix. Il croit qu'il ne peut pas y parvenir sans se réincarner.
Quand le « je » est là, Dieu n'est pas là. Si vous dites « je ne suis pas », alors Il est là et fait tout pour vous. Ne vous inquiétez pas car Il est en tous. Si vous abandonnez l'ego du corps, alors tout vous appartient, car vous êtes en tout et en tous. Ce n'est ni facile ni difficile mais la compréhension doit faire son chemin et devenir conviction. Puisque vous n'êtes pas, qu'y a-t-il donc ? Cette question se pose automatiquement. Celui qui a rejoint le maître sait qu'il est lui-même la réalité. Vous êtes le Seigneur du monde, ne vous limitez pas à être une petite créature, soyez le pouvoir suprême. Les conditions et les circonstances changent, mais vous, vous ne changez jamais. Votre compréhension doit être transformée, c'est tout. Qu'il soit le plus pauvre ou le plus ordinaire des hommes, celui qui comprend que rien n'est réel est le plus grand des grands. La crainte de Dieu s'évanouit quand vous comprenez que tout, y compris les Dieux, sont illusion. Vous ne craignez plus personne car vous êtes le pouvoir créateur. Si la maison que vous avez construite ne vous plaît plus, vous pouvez la détruire sans que personne ne puisse s'y opposer. De la même façon, Dieu a créé le monde, mais si vous comprenez que vous êtes ce dieu créateur, il n'y a plus lieu de s'inquiéter de rien. Tout se passe alors, selon « ma volonté ».
Soyez donc cela, c'est l'essentiel. Tous les pouvoirs sont mon pouvoir. Le pouvoir de chaque être est le vôtre car il est vous-même. Vous n'arrivez pas à comprendre cela à cause de votre concept du « je ». Dieu et vous n'êtes que les deux faces d'une même pièce. Changez de face, changez votre mental et vous êtes Dieu. Pourquoi vous en faire pour ce non-sens qu'est le monde ? C'est à cause du plaisir de quelqu'un d'autre que vous avez pris naissance, et vous devez endurer ensuite une multitude de problèmes tout au long de votre vie. Dites avec conviction que ce corps qui vous a été donné par Dieu, n'est pas vôtre. Dès que vous affirmez « je ne suis pas cela », vous êtes heureux. Saint Toukaram ne voulait jamais rien faire. Sa femme lui disait toujours : « fais quelque chose ! » Il ne voulait pas d'argent. Mais un jour sa femme rapporta un sac de piments de la maison de son père et elle le pria d'aller les vendre au marché. Toukaram ne voulait pas être pris au piège du monde, il alla au marché et les distribua gratuitement à qui en voulait. Il rentra très vite à la maison et surprise de le voir si tôt, sa femme lui dit : « comment se fait-il que tu sois déjà là ? » Il répliqua : « tous les piments sont partis ». « Combien d'argent ramènes-tu ? », demanda-t-elle. Il répondit : « l'argent viendra plus tard ». Il savait que faire commerce dans ce monde et y déployer intelligence et ingéniosité est un piège, car le monde est illusion. Quand vous n'êtes pas identifié au corps, personne ne peut vous piéger. Toutes les peurs viennent du corps. Si vous comprenez que le monde n'est rien, à quoi bon y faire preuve de trop d'habileté ?
Les gens veulent toujours agir et devenir « quelqu'un » mais être trop brillant dans le monde, c'est s'aliéner. Vous devez refuser l'ego, c'est la seule chose à faire, n'employez pas votre intelligence à acquérir les biens du monde, mais seulement dans le but d'atteindre la réalité. Tout le monde se lance dans une course effrénée dans le seul but de remplir son ventre. Que peut donc vous apporter la richesse ? Un bon endroit pour dormir ? Mais tous sont égaux dans le sommeil. Celui qui dort dans la rue et celui qui dort dans un palais, sont égaux dans le sommeil. Le mental n'est jamais satisfait, il est comme la queue d'un chien : vous aurez beau la mettre dans un tube rigide pour l'empêcher de se recourber, même pendant cent ans, elle reviendra forcément à sa forme première dès que vous enlèverez le tube. Le mental n'est jamais satisfait de ce qu'il a, mais plus vous possédez, plus vous avez de soucis. Vous croyez toujours que quelque chose de mieux peut arriver, mais le mieux qui puisse vous arriver c'est de comprendre qui vous êtes, de comprendre que vous n'êtes ni le corps ni le mental. Tout le monde veut être « grand », mais ce qui est grand, c'est la réalité. Si vous comprenez cela, vous devenez le plus grand des grands. Le mental n'est que vos pensées, rien d'autre, et vous pensez tellement ! Le flux de vos pensées est sans fin.
Vous êtes sans ignorance, sans connaissance,
et c'est cela que l'on appelle la réalité sans concepts.
Si vous venez à bout de l'ignorance le maître vous dira à ce moment-là d'oublier cette connaissance également, car finalement elle doit disparaître. La connaissance est dangereuse, le désir d'acquérir la connaissance ne peut être comblé, car elle n'est pas réelle. Vous êtes sans ignorance, sans connaissance, et c'est cela que l'on appelle la réalité sans concepts. Dans un rêve, de nombreux événements apparaissent et disparaissent, mais le rêveur ne fait rien. Quand il se réveille, il sait que rien ne s'est passé. Faites de même à l'état de veille, voyez tout ce qui se passe comme un long rêve. C'est par la compréhension que l'on cesse d'être esclave du corps, alors, l'ego disparaît automatiquement car il comprend qu'il n'a plus sa place. L'ego est toujours en quête du meilleur, mais il ne comprend pas ce qui est vraiment « suprême » car il est dans la confusion et ne peut discerner le vrai du faux. C'est ainsi qu'il est toujours à la recherche du bonheur extérieur. Tout d'abord vous devez oublier l'ego et ensuite tout le reste se dissoudra. Si vous dites « c'est ma maison », tous les problèmes vous tombent dessus. C'est le corps qui veut un lieu privé, mais quand vous comprenez que vous n'êtes pas ce corps, vous pouvez vivre n'importe où. Essayez de discerner ce que je suis de ce que je ne suis pas. Vous êtes heureux quand le monde fait faillite en vous.
Visiteur : Au moment de l'éveil, devons-nous affronter notre propre mort ?
Maharaj : Pourquoi craignez-vous la mort ? Cette peur est ancrée dans votre mental ; vous ne voulez pas mourir. Mais quand vous comprenez que vous n'êtes pas le corps, vous n'avez plus à vous inquiéter de rien. Si votre voisin meurt, vous ne ressentez pas grand chose, mais quand votre corps est sur le point de s'en aller, vous êtes si perturbé que vous ne savez plus quoi faire. Quel est le dernier désir du condamné à mort ? « Je ne veux pas mourir ».
Visiteur : Quand Ramana Maharshi était tout jeune, il a été confronté à sa propre mort et il a réalisé.
Maharaj : Oui, mais la mort n'est qu'un concept puisque ce corps est déjà un cadavre, bien qu'il vive. Les sages disent beaucoup de choses : « cela s'est passé comme ceci ou comme cela ». Pourquoi pas, mais en fait, il ne s'est rien passé. C'est cela que vous devez saisir. Quand la mort approche, vous appelez le meilleur des docteurs pour qu'il vous sauve, mais il est trop tard, vous ne pouvez plus rien faire. C'est maintenant que vous pouvez comprendre que ce corps est déjà un cadavre et alors vous devenez le pouvoir lui-même. Les yeux et tous les sens ne peuvent pas fonctionner sans le pouvoir, quand l'électricité est déconnectée, l'ampoule ne fonctionne plus. Comprenez dès maintenant que vous êtes le pouvoir qui meut ce corps et ce pouvoir est le même qui œuvre en tous. Mais en fin de compte, le pouvoir lui-même n'est pas réel. Quand vous mourez, le pouvoir est déconnecté et l'ego semble disparaître, mais par la compréhension, l'ego se dissout totalement alors que vous êtes toujours en vie. Le désir du corps est ego. Vous pouvez sortir du cycle des morts et des naissances en ce moment même en comprenant que naissance et mort ne concernent que le corps et pas vous. Sachez que vous ne mourez jamais même si le corps doit mourir, que vous soyez le seigneur Krishna ou le Christ. Comprenez correctement ces expériences. Au moment de la déconnexion, soyez fort, et dites : « je ne suis pas cela ». Quand vous comprenez que vous n'êtes pas cela, vous ne vous inquiétez plus jamais.
Si l'un de vos proches meurt, ce n'est pas pour cette personne que vous pleurez, mais pour vous-même. Tout le monde pleure par intérêt personnel. Vous pensez : « maintenant qu'il est parti, que vais-je devenir ? » Je me souviens d'un voisin qui pleurait à la mort de sa mère, il se lamentait : « qui va m'appeler mon petit garçon maintenant ? » Il avait 57 ans ! Pleurait-il pour elle ? Le fait est, que vous ne pleurez jamais pour quiconque, mais pour vous-même seulement. C'est ainsi que va le monde.
Je suis omniprésent, je suis le Soi qui est en tout.
Si vous vous comprenez vous-même, vous êtes satisfait à jamais : « je suis omniprésent, je suis le Soi qui est en tout ». Mais les hommes sont toujours en quête d'un support quelconque dans la vie, c'est ça le drame. Débarrassez-vous du support de l'ego, que peut donc vous apporter cette béquille, puisque rien n'est vrai ? C'est votre mental qui vous affirme le contraire. L'aveugle a besoin d'une canne, d'un support, mais s'il comprend correctement, il dira : « Mes yeux sont morts, c'est bien mieux de ne pas voir le monde. » Oubliez tout, et vous serez toujours satisfait. Ce contentement doit emplir votre esprit.
Le désir ne peut jamais être satisfait, car il s'agit toujours du désir pour ce qui n'est pas. Comment le désir pourrait-il être comblé, quand il concerne ce qui n'existe pas ? Le désir de l'être réalisé est toujours comblé, car il ne veut que la réalité. Il n'est jamais malheureux, mais au contraire, toujours satisfait en lui-même.
Bombay - 20 janvier 1998
TAD NISKALA (Ce que je ne suis pas) par Shankaracharya
Om, je ne suis pas le témoin, l’intelligence, l’ego ni le mental, ni les oreilles ni la langue, ni les sens de l’odorat et de la vue, ni l’éther ni l’air.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne suis ni le prana ni les cinq souffles essentiels, ni les sept éléments du corps, ni ses cinq gaines, ni les mains, ni les pieds, ni la langue, ni l’action d’aucun membre.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Pas de peur, d'avarice ou d'ignorance, pas de préférence, aucune fierté ni ego, ni dharma ou Libération, je ne suis ni le désir ni l’objet du désir.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni plaisir ni haine, ni vertu ni vice, ni mantra ni espace sacré, pas de Védas ni de sacrifice. Je ne suis ni le mangeur ni la nourriture ni l’acte de manger.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni la peur, ni la mort, ni différence de caste, ni père, ni mère, pas de naissance, ni ami, ni camarade, ni disciple, ni gourou.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je n’ai ni forme ni besoin, omniprésent j’existe partout, pourtant je suis au-delà des sens, je ne suis ni le salut ni quelque chose de connaissable.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !