LE SOLEIL NE CONNAÎT NI LA LUMIÈRE NI L'OBSCURITÉ par Ranjit Maharaj
Source : « Je ne parle que de vous. » par Ranjit Maharaj – Les Deux Océans (Paris)
En vérité, votre état est la Félicité Absolue, pas cet état du monde du phénomène. Dans l'état du non-phénomène vous êtes félicité totale, mais vous n'en pouvez faire l'expérience. Dans cet état il n'y a ni misère ni malheur, seulement une pure félicité.
Sri Nisargadatta Maharaj
Le Soi suprême est votre état naturel, il est au-delà du divin car il est la réalité finale, Il est la vérité éternelle présente dans les quatre états de veille, de rêve, de sommeil profond et de la conscience pure (turya). Si vous essayez de le connaître, il vous apparaîtra comme le néant car il ne peut pas être perçu. Il est là quand tous les concepts prennent fin mais il est quand même présent quand les concepts sont là ! Le mouvement subtil qui est ressenti dans le Soi immuable est appelé « conscience » ou « je suis ». Ce mouvement dans le Soi caractérise l'illusion. Le Soi est affublé de noms tantôt masculins, tantôt féminins et tantôt neutres, mais tous ces noms ne sont que des indications car il ne peut pas être perçu.
L'expérience « je suis » est existence, conscience et félicité (sat-chit-ananda). On lui donne aussi d'autres noms comme connaissance, Dieu ou Soi, etc. Mais ce qui existe éternellement, sans expression ou manifestation, est le Soi suprême (Para-brahman). Om, le son primordial, est aussi le « je suis », il est à la source des mantras. Ainsi le « je suis » est l'illusion primordiale.
Siddharameshwar Maharaj
Visiteur : Il y a quelques jours, quelqu'un a dit : « je vois », vous avez alors répondu « c'est le pouvoir qui voit ». Vous avez dit également que si le maître donne l'adresse à deux personnes et que l'une d'elles ne s'y rend pas, c'est à cause de son ego car c'est lui qui fait obstacle, mais le pouvoir qui est en elles est pourtant identique. Pouvez-vous éclaircir ce point ?
Maharaj : Le pouvoir ne fait rien. Le pouvoir est pouvoir. Là où vous le dirigez, il fonctionne. Si vous connectez l'électricité au ventilateur, il fonctionne, et si vous la connectez à l'ampoule électrique, elle fonctionne également. L'électricité ne fait rien, vous êtes bien d'accord ? Quel que soit le support vers lequel vous la dirigez, ça fonctionnera. Mais sans le pouvoir vous ne pouvez rien faire. Alors, qui agit ? On ne peut trouver d'agissant, personne n'est l'auteur de toutes les actions, bonnes ou mauvaises. Le pouvoir n'a connaissance de rien. Supposez par exemple que l'électricité tue quelqu'un, pouvez-vous lui faire un procès ? Vos mains ne peuvent pas bouger sans le pouvoir mais l'ego croit être l'auteur de toutes les actions et répète sans cesse « je fais, je vois, etc. » Qui est ce « je » ? Trouvez-le.
Il dit qu'il est Bab, mais où est-il ? Ce n'est qu'un nom, et un nom n'est pas réel. Si le coupable est introuvable, alors le procès est annulé. Vous avez fait de vous un coupable puisque vous dites continuellement : « je fais, je vois, je tue », vous risquez la peine de mort ou la prison puisque vous déclarez avoir commis un meurtre. Vous croyez que vous êtes l'ego, mais vous n'êtes pas cela. La graine est Une et à partir de cette unique graine de nombreux fruits sont produits, certains sont aigres, d'autres sucrés, d'autres mauvais. Pouvez-vous accuser la graine ?
C'est à cause du mental que vous jugez les choses bonnes ou mauvaises, il est l'agent de votre pouvoir et discrimine tout ce qu'il voit. C'est la même chose en ce qui concerne le créateur et la création : le créateur est introuvable. Nos écrits philosophiques disent que le créateur n'existe pas. Il est appelé maha maya. Maha signifie « grand » et maya « ce qui n'est pas », c'est-à-dire : grande illusion. Ce qui n'est pas peut faire une multitude de choses ...
Quand vous rêvez, vos yeux sont clos, vous dormez, et pourtant dans ce rêve vous pouvez tuer quelqu'un. Qui donc a tué ? Quand vous vous réveillez, où est l'assassin ? Vous vous dites : « comment pourrais-je tuer quelqu'un ? » Immédiatement vous ajoutez : « ce n'était qu'un rêve ».
Le monde n'est qu'un long rêve, vous n'existez pas
mais vous persistez à dire « je fais ».
Ainsi celui qui n'existe pas, fait tout, et dès que vous dites « je suis l'agissant », vous êtes soumis à la sentence. L'électricité ne sait pas qu'elle fait fonctionner le ventilateur, le soleil ne sait pas qu'il donne la lumière, s'il disait : « je donne la lumière », ce ne serait pas le soleil. Si la mangue dit « je suis sucrée », ce n'est pas une mangue. Alors où est le « je » ? L'agissant est introuvable.
On vous donne un nom et vous dites que vous êtes cela. Quand vous mourez, votre nom est consigné dans un registre : monsieur untel est mort. C'est-à-dire que le nom qui est apparu, a disparu. Personne ne meurt, soyez-en sûr, mais vous avez peur de la mort parce que vous vous identifiez au corps. C'est parce que vous dites « je suis le corps » que vous mourez. C'est le corps qui a pris naissance, mais vous, vous n'êtes pas né. Le pouvoir est là, alors la lumière apparaît et quand l'ampoule est grillée, vous en mettez une autre. L'électricité ne sait pas si l'ampoule est bonne ou mauvaise, elle ne sait pas non plus s'il y a de la lumière ou pas. Le pouvoir n'a connaissance de rien, il ne discrimine pas même s'il est la connaissance elle-même.
Si le pouvoir n'était pas là, vous ne pourriez rien faire, c'est grâce à lui que vous faites toute chose. Qui est l'agissant, qui a fait le rêve ? Dites-moi donc, vous êtes en train de dormir, vous êtes dans l'ignorance la plus complète, vous êtes bien d'accord ? Une pensée a surgi et alors tout peut arriver : un roi peut devenir mendiant dans un rêve, et vice versa. Qui produit cela ? De l'ignorance une pensée a surgi et n'importe quoi peut arriver mais au réveil vous êtes certain que c'était faux, que ce n'était qu'un rêve. Ce monde est aussi un rêve. C'est grâce au pouvoir que vous faites toute chose, mais quoi qu'il arrive, il n'accepte ni le blâme ni le mérite. Le pouvoir ne sait pas qu'il est le pouvoir. Vous devez comprendre ces choses subtiles. Quand vous dites « je vois », qui voit ? C'est grâce au pouvoir que vous voyez, mais lui ne voit pas. C'est avec le pouvoir que tous les sens fonctionnent. Ce que vous faites n'est que le produit de vos pensées, sans vos pensées pouvez-vous faire quelque chose ? Pensée veut dire mental et sans le mental vous ne pouvez rien faire. Le mental fonctionne avec ce pouvoir.
Visiteur : D'où viennent les pensées ?
Maharaj : Du zéro. Quand vous dormez vous êtes dans l'ignorance totale, puis une pensée surgit spontanément. La connaissance et l'ignorance sont alors toutes deux sous une forme subtile. Tant que vous respirez, la connaissance est là. La respiration est un relais du pouvoir. Tout se combine et s'entremêle, alors comment trouver l'agissant ? En fait, il n'y a personne. Pourquoi ? Parce qu'il n'existe pas, il est illusion et une illusion ne peut être vraie. Si vous dites que c'est le pouvoir qui agit, c'est faux également, car le pouvoir ne fait rien. Quand vous faites sécher vos vêtements au soleil, le soleil sait-il que c'est grâce à lui qu'ils seront secs ? Le soleil ne connaît ni la lumière ni l'obscurité. Le pouvoir n'a pas de discrimination.
Visiteur : Le mental est-il distinct de l'ego ?
Maharaj : Le mental est ego, il est l'agent de l'ego. S'il y a un directeur, il y a aussi un employé, l'un ne va pas sans l'autre, ou bien l'usine ne pourrait pas fonctionner. Ce corps est une usine à merde, vous êtes d'accord ? C'est bien ce qu'il produit, n'est-ce pas ? Vous dites que vous êtes le propriétaire de ce moulin à merde. C'est l'ego qui dit « je suis cela ».
Vous devez réfléchir à ces choses et aller plus loin, là où il n'y a plus de pensée c'est la réalité finale. Sans la réflexion vous n'êtes pas un homme, vous êtes un animal. L'être humain a le pouvoir de discerner le vrai du faux, de discerner la réalité. Qui fait, et qui parle ? Le « je » ne peut pas parler, le pouvoir doit être là pour que la parole jaillisse. S'il n'est pas là, alors il n'y a rien. Je ne suis pas l'ignorance, je ne suis pas la connaissance, et je ne suis pas non plus celui qui pense. Tout cela n'est rien d'autre que vos concepts. La connaissance et l'ignorance sont les deux faces d'une même pièce. Quand vous posez la question « qu'est-ce que c'est ? », cela veut dire que vous êtes ignorant de la chose, mais c'est pourtant avec la conscience-connaissance que vous posez cette question. La réalité, elle, ne fait rien, mais vous, vous dites « j'ai fait ». Vous devez comprendre tout cela et aller au-delà.
La connaissance n'est qu'un concept.
La réalité a été oubliée et la connaissance a surgi.
C'est donc de l'ignorance, de l'oubli,
que la connaissance a émergée.
Alors comment pourrait-elle être vraie ?
Si la source est amère, l'eau que vous buvez est amère également.
Tout ce qui est, est la connaissance (ou conscience), rien d'autre,
mais la connaissance elle-même n'est pas réelle.
C'est cela que vous devez comprendre. Ici, je parle de la dernière étape. Quand la connaissance est là, tout est fait par elle, mais d'où vient cette connaissance ? Elle vient du zéro.
Comprenez qui vous êtes. Vous ne vous connaissez pas et malgré tout vous dites que vous êtes ceci ou cela. Vous créez la confusion en vous. Si le « je » n'existe pas, alors qui voit, qui entend ? En fait, rien ne se passe, mais vous êtes convaincu de faire l'expérience du monde. C'est comme dans un rêve : vous voyez, entendez et expérimentez, mais quand vous vous réveillez, est-ce que cela est toujours réel ?
Ce monde n'est qu'un rêve à l'état de veille,
c'est maha maya, la grande illusion.
Ce n'est rien, mais à partir de ce rien de nombreuses choses ont émergé et c'est sans limite, à partir du zéro, on compte des millions. Le « je » ne peut pas naître s'il n'y a pas le zéro à la base mais la réalité n'a rien à voir avec tout cela ...
Vous chantez, dansez, riez ou pleurez dans un film mais l'écran est-il concerné par tous ces événements ? L'écran reste toujours écran. Comprenez que ce n'est rien, car tout cela a pour origine le point zéro. C'est parce que vous êtes sous l'emprise de l'ignorance que vous croyez que c'est réel. Sous l'influence de l'alcool, l'ivrogne s'exclame : « Je suis un roi », et vous, sous l'emprise de l'ignorance, vous dites : « je suis untel, une telle » (Maharaj s'adresse à un occidental à qui un maître a donné un nom indien). Pourquoi donner plusieurs noms à ce qui n'a pas d'entité ? Cela a-t-il du sens ?
Celui qui comprend, dit que rien ne s'est passé. Ainsi le rien peut faire une multitude de choses, et cela parce que ce n'est rien. Mais en vérité, seule la réalité est et elle ne fait rien, elle n'est affectée par rien. Quand vous vous comprenez, vous pouvez affirmer que le monde n'est rien mais tant que vous vous considérez comme une entité séparée du monde, vous êtes convaincu d'être différent des autres. Par la compréhension vous vous débarrassez de tout, exactement comme lorsque vous gommez une erreur sur le papier. Vous devez oublier tout ce que vous avez appris jusqu'à présent, car tout ce que vous dites est faux, jamais vous ne dites la vérité. Seule la base est vraie et cette base c'est vous sans le « vous », c'est la réalité qui est toujours là mais ne dit jamais rien. Comment même le monde pourrait-il se maintenir sans cette base ?
Ne soyez ni le témoin, ni l'accusé car il n'y a pas d'observateur, il n'y a personne qui voit, qui agit etc. L'aliénation est créée par le fonctionnement discriminatoire du mental : vertu, péché, bonnes ou mauvaises actions ... Vous gardez cette dualité pour compagne, alors quand vous mourez, les bonnes et les mauvaises actions restent imprimées dans votre mental. Quand un saint meurt, il ne s'inquiète de rien car il n'existe pas et n'emporte donc aucun concept avec lui. Il sait que personne ne meurt, que naissance et mort ne sont que des concepts.
Visiteur : L'autre jour, vous avez dit que lorsque le corps et le mental meurent, seul le désir de renaître persiste. Y a-t-il une relation entre le désir et le pouvoir ?
Maharaj : Sans le pouvoir, pouvez-vous faire quelque chose ? Le désir ne peut pas apparaître sans le pouvoir.
Visiteur : Le désir et le pouvoir sont-ils une seule et même chose ?
Maharaj : Non, le désir est un concept, ne mélangez pas tout ! Les désirs et les peurs viennent de l'ego, qui n'est rien de plus que votre identification au nom. Le pouvoir n'a rien à voir avec tout cela. L'ego ne peut être si le pouvoir n'est pas là. C'est le pouvoir qui œuvre en vous mais vous dites : « je fais, je vois, je ressens ». En fait c'est lui qui fait tout cela - le corps n'est qu'une combinaison d'éléments - mais le pouvoir ne dit rien, il ne sait même pas qu'il est le pouvoir. C'est l'ego qui s'attribue la responsabilité des actes : « je veux, je fais » dit-il. Sans le pouvoir, vous ne pouvez rien faire,
mais dans la compréhension finale,
le pouvoir lui-même n'existe plus,
il disparaît car tout est dissout dans la réalité.
Désirs et peurs concernent le corps, ils sont la cause de toutes vos souffrances, de toutes vos douleurs mais vous persistez à vous identifier à ce corps, alors qu'il n'est qu'un abcès qui a poussé sur vous. Vous devez vous en débarrasser par la compréhension.
Combien de fois avez-vous pleuré dans cette vie ? Pleurer pour quoi ? On dit d'un jeune enfant qui pleure sans cesse, qu'il pleure pour rien. Qui peut vous aider quand vous pleurez pour rien ? Et c'est bien ce que vous faites tous, car vous voulez ce qui n'existe pas. Vous recherchez le bonheur mais comment pouvez-vous l'obtenir ? Comprenez ce que sont la souffrance et le plaisir, examinez vos pensées, votre mental et alors plus rien ne se maintiendra. Après la compréhension, plus rien ne persiste. Vous dites que ceci est un vase, mais il peut se briser en une fraction de seconde et disparaître, comprenez plutôt que ce n'est rien dès l'origine. On vous demande toujours votre nom et vous le donnez volontiers, mais vous êtes sans nom. Allez à la source de toutes choses, d'où tout a commencé. Si vous allez à cette source, rien ne se maintiendra. Les saints vous disent de vous connaître vous-même. C'est à cause de l'ignorance que vous avez le désir d'être quelqu'un. Que peut-on dire de celui qui n'a pas de nom ? Il est simplement comme l'espace, rien. Si vous allez à la source du « je », il disparaîtra. Plaisirs et souffrances apparaissent quand votre mental s'objectivise et s'identifie au corps.
Les actions sont éphémères, au moment même où vous agissez, l'acte disparaît. L'action devient non-action aussitôt faite ; ce qui est fait est fait. La trace de l'action ne reste que dans le mental qui a pour habitude d'accumuler tout ce qui n'existe pas. Tout ce que vous voyez et percevez, tout ce que vous croyez comprendre, n'est rien. Disons maintenant que le monde n'est que l'ombre de la réalité. Eh oui ! Un reflet n'est pas la chose, si vous le prenez pour vrai, vous êtes perdu.
Tout le monde vénère Dieu, mais personne ne sait qui il est. C'est l'ignorance qui vous fait dire que Dieu est là, mais en fait il n'est nulle part. Ce Dieu, c'est-à-dire ce pouvoir qui œuvre en vous, disparaîtra aussi. Si vous comprenez vraiment Dieu, vous n'adorerez personne. Ce pouvoir qui est en vous est le même dans le Christ et dans Krishna, mais il est aussi éphémère.
Visiteur : Ce pouvoir dont vous parlez, est-ce la réalité ? Qu'est-ce que ce pouvoir ?
Maharaj :
Le pouvoir est la connaissance
et la connaissance finit par disparaître.
Dans la réalité il n'y a ni connaissance ni ignorance.
Comment ce qui a pour point de départ le zéro, pourrait-il être réel ? L'espace est zéro, néant. Un cyclone apparaît dans l'espace, d'où vient-il ? Il sème le chaos puis il disparaît, où a-t-il disparu ? Dans l'espace à nouveau. Ainsi, l'espace qui est néant, a du pouvoir n'est-ce pas ? Tout se passe dans l'espace, mais malgré tout, ce n'est rien. Le pouvoir lui-même est irréel. Quand vous dites : « je sais », c'est le pouvoir, c'est la connaissance. Ce qui se manifeste est toujours faux, ce n'est pas réel. L'espace n'est que néant, mais tout surgit de ce rien et il est si puissant ! C'est quand vous êtes dans ce zéro que le rêve apparaît, vous ne pouvez pas rêver si vous ne dormez pas. Le pouvoir est zéro, et de là tout commence. Ainsi ce monde est créé à partir du zéro. Alors, qui est le créateur du zéro ? Vous ne pouvez pas trouver le créateur du zéro. De même, qui est le créateur du rêve ? Vous dormez, vous ne faites rien, mais le rêve apparaît. C'est lorsque vous vous réveillez que vous pouvez dire : « ce n'était qu'un rêve ». Le monde est réel pour tous, sauf pour l'être réalisé.
Visiteur : Alors, qu'est-ce qui est réel ?
Maharaj : La réalité finale, là où il n'y a ni ignorance ni connaissance. Tout ce qui se passe n'est rien car tout a pour origine le néant. Vous vous oubliez, vous tombez dans le zéro et de là tout se manifeste. La réalité finale est oubliée et ce qui n'est pas, apparaît. Comme je l'ai dit auparavant, le monde n'est que le reflet de la réalité et un reflet n'est pas réel.
Visiteur : Dans la réalité finale il n'y a pas de pouvoir, n'est-ce pas ?
Maharaj : C'est juste, il n'y a ni pouvoir ni pensée. Pour qu'il y ait pensée le pouvoir doit être là. En définitive il n'y a que la réalité et vous êtes vous-même cette réalité. Les mots ne peuvent l'atteindre, ils butent là, et ricochent. Les mots viennent de l'espace et vous devez transcender l'espace. S'il n'y avait pas d'espace, pourriez-vous parler ? La connaissance provient de l'espace, c'est-à-dire du zéro, et à partir du rien, tout se manifeste. Ainsi le « rien » peut tout faire, le zéro a ce pouvoir. Tout ce que vous voyez et percevez vient de cette connaissance, et l'ignorance c'est de croire qu'elle est réelle. La connaissance est Dieu, le créateur est connaissance. Ceci est à la fois facile et difficile à comprendre. Il suffit d'oublier votre « je » et tout est clair. C'est le « je » qui ne vous autorise pas à comprendre cela.
Visiteur : Quelle est l'expérience de celui qui a saisi la vérité ultime ?
Maharaj : Il comprend que « je suis là », sans le « je ». Le Soi est, sans le soi, c'est son expérience.
Visiteur : Alors, quand il n'y a plus d'ignorance, d'où vient donc le pouvoir ?
Maharaj : Tant que le corps est là, l'ignorance l'est aussi. Pourquoi essayer d'imaginer ce qu'est l'être réalisé ? Réalisez tout d'abord et ensuite vous pourrez en parler. Alors la question n'aura plus lieu d'être. Quand vous vous réveillez d'un rêve, vous savez qu'il n'y avait rien. Ici, tous sont dans l'ignorance. L'être réalisé dit que tout ce que vous voyez n'est rien, et quand un corps disparaît il dit aussi que rien ne s'est passé. Toutes ces choses se produisent à partir du zéro, alors qu'est-ce qui est réel, puisque tout n'est rien ? Qui suis-je maintenant ? Vous êtes, mais le « je » n'est pas réel.
Visiteur : Un plus un est égal à deux, c'est logique. Est-ce que de comprendre la réalité est aussi logique et aussi facile que cela ?
Maharaj : C'est plus facile ! Un plus un est une méthode alors que pour atteindre la réalité il n'y a pas besoin de méthode, puisque vous êtes déjà Elle. Qui peut connaître qui ? Ici la dualité a disparu. Un plus un, c'est toujours dans le domaine de la dualité, alors que dans la réalité il n 'y a que la réalité, soi-même sans le « je ».
Visiteur : Je ne vois pas autre chose que la dualité. Je n'ai pas de preuve de ce que vous dites ...
Maharaj : Il n'y a pourtant rien d'autre dans ce monde que la réalité. Tous, ne sont que des bulles à la surface de l'océan, il y en a des millions, et vous n'êtes que l'une d'entre elles. Vous devez faire éclater votre bulle, c'est tout. Le maître vous aide à le faire en vous faisant comprendre que vous êtes la réalité, alors pour connaître ce que vous êtes déjà, rien de plus facile. Vous avez une fausse idée de vous-même, c'est le seul problème.
Tout le monde est la réalité car il n'y a que l'unité.
Puisque tout n'est rien, qu'y a-t-il à expérimenter ou ne pas expérimenter ? Pourquoi l'espace devrait-il s'inquiéter de quoi que ce soit ? Les choses apparaissent et disparaissent mais il n'est pas touché : l'espace reste espace. Soyez comme lui et dites que rien ne s'est passé. Tout apparaît sur l'écran pour disparaître ensuite. Si ces choses étaient réelles, elles se maintiendraient. Ce n'est pas parce que de bonnes pensées vous viennent à l'esprit que vous êtes bon, de même, les mauvaises pensées ne vous rendent pas mauvais ; les pensées ne font que passer. Le passé, le présent et le futur n'existent que dans votre mental.
Vous voulez aider les autres, mais qui êtes-vous pour aider les autres ? Comment pouvez-vous aider quiconque, puisque vous n'existez pas. L'existence de la plupart des gens, de toutes façons, se résume à l'argent. C'est grâce à l'argent que vous dites « j'ai fait des bonnes actions, je suis compatissant ». Celui qui n'a pas d'argent, a-t-il moins de compassion ? Votre compassion n'est qu'un désir. Si vous faites don de trois ou quatre millions, votre compassion est limitée, alors que celle de Dieu est infinie. Qui êtes-vous pour avoir pitié des autres ? Vous n'existez pas ! Qui est compatissant, qui est bon, qui est mauvais ? Tout cela n'est que concept. Le mental prend de nombreuses couleurs car par nature la connaissance veut toujours s'accroître, mais elle n'en est pas moins la plus grande des ignorances. Vous ne serez jamais heureux si vous ne comprenez pas cela.
Visiteur : L'idée de naître et de renaître ne veut rien dire ?
Maharaj : Rien. Personne ne renaît, personne ne meurt non plus. Il n'y a ni naissance ni mort. Si par exemple, vous accouchez d'un enfant dans un rêve, quelle date de naissance lui donnerez-vous ? Ce monde n'est qu'un long rêve ...
Visiteur : Les Écritures parlent de renaissance, mais aussi de ne pas renaître. Qu'en dites-vous ?
Maharaj : Tout dépend de votre désir. C'est par votre propre désir que vous prenez naissance. Celui qui n'a plus de désir, peut-il prendre naissance ? Le désir d'avoir un corps est le plus fort des désirs. Si l'immeuble que vous habitez est condamné a être démoli, vous vous mettez tout de suite à la recherche d'une nouvelle demeure. Le saint, lui, ne s'inquiète de rien et si cela lui arrive, il dira : « le ciel est mon toit, je peux dormir n'importe où ». Mais vous, vous voulez une maison, un corps. Pourtant le corps n'est rien. Tous ces concepts sur la naissance et la mort sont l'œuvre du mental. La compréhension de ces choses ne viendra que par une réflexion intense. Personne ne vous met des chaînes, vous les mettez vous-même. Ainsi, ce n'est pas difficile de se connaître, car en fait vous ne vous oubliez jamais, vous êtes toujours là mais identifié au « je » vous avez une mauvaise représentation de ce que vous êtes. Débarrassez-vous de cette fausse identification et soyez convaincu que tout n'est rien, voilà l'attitude juste. Dès que vous dites « c'est quelque chose », vous êtes perdu et les ennuis commencent. Qu'est-ce qui est réel ? Vous, sans le « vous ».
Visiteur : Qu'est-ce que la grâce ?
Maharaj : La grâce, c'est la compréhension. Le maître vous donne la compréhension et la grâce c'est de l'accepter. L'enfant va à l'école pour apprendre ce que le maître enseigne, mais s'il refuse d'apprendre, à qui la faute ? S'il accepte, il pourra lui aussi devenir professeur, pourquoi pas ? L'acceptation est nécessaire, il ne suffit pas de poser la main sur la tête de quelqu'un pour qu'il comprenne. La grâce, ce n'est pas cela, cette idée est un non-sens. Vous devez expérimenter ce que dit le maître, soyez cela ! Il n'y a pas à devenir quoi que ce soit car vous êtes la réalité en ce moment même. Le maître supprime l'ignorance en vous. Vous ne gagnez rien.
Bombay - 10 Janvier 1998
TAD NISKALA (Ce que je ne suis pas) par Shankaracharya
Om, je ne suis pas le témoin, l’intelligence, l’ego ni le mental, ni les oreilles ni la langue, ni les sens de l’odorat et de la vue, ni l’éther ni l’air.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne suis ni le prana ni les cinq souffles essentiels, ni les sept éléments du corps, ni ses cinq gaines, ni les mains, ni les pieds, ni la langue, ni l’action d’aucun membre.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Pas de peur, d'avarice ou d'ignorance, pas de préférence, aucune fierté ni ego, ni dharma ou Libération, je ne suis ni le désir ni l’objet du désir.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni plaisir ni haine, ni vertu ni vice, ni mantra ni espace sacré, pas de Védas ni de sacrifice. Je ne suis ni le mangeur ni la nourriture ni l’acte de manger.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je ne connais ni la peur, ni la mort, ni différence de caste, ni père, ni mère, pas de naissance, ni ami, ni camarade, ni disciple, ni gourou.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !
Je n’ai ni forme ni besoin, omniprésent j’existe partout, pourtant je suis au-delà des sens, je ne suis ni le salut ni quelque chose de connaissable.
Je suis éternelle extase et conscience sans limite. Je suis Shiva !
Je suis Shiva !