Les quatre visions
Source :
Hymnes aux Kali, la roue des énergies divines de Lilian Silburn – commentaires
Il faut éclaircir un point essentiel qu’il faut comprendre sous peine de ne rien comprendre aux textes Trika et Krama et de se heurter à d’insolubles contradictions quant au monde différencié et indifférencié. Ce qui est en cause n’est pas le monde lui-même, mais notre perception à son égard, la mesure que nous en prenons. Comme cette perception va se transformant grâce à l’œuvre des kali, le monde revêt de nouveaux aspects pour être finalement perçu dans sa réalité. Un schéma va permettre de définir avec clarté les diverses visions que l'on peut avoir de soi-même et du monde :
1. La dualité qui rive au devenir, vision dirigée vers son objet en vue d’un but, vision de l’homme ordinaire qui appréhende les choses en leur dispersion et séparées de lui-même. Il n’a ni conscience de Soi ni conscience de l’univers en leur nature essentielle. Sa prise de conscience est à la mesure du monde différencié.
2. Le samadhi ou turya, Quatrième état d’un yogi ayant pleine conscience de Soi mais qui, au sortir de cet état, perçoit à nouveau le monde dans la dualité à l’instar de l’ignorant, ses tendances inconscientes exigeant d’être purifiées et sa pensée d’acquérir une profonde discrimination et une compréhension plus étendue.
3. La Conscience de Soi se diffusant dans la vision du monde lors de la pratique des kali qui tend à égaliser, au sein même du devenir, conscience de Soi et activités variées. Dès que le perçu n’est plus projeté hors du Soi, la prise de conscience passe de la mesure de la connaissance à celle du sujet.
4. A la fin, la mesure se perd dans la certitude quand règne la Conscience indifférenciée et ininterrompue qui contient le multiple comme identique à elle-même. L’ambiguïté porte ici sur le sens de multiple ou différencié car, désormais, les choses apparaissent aussi distinctes les unes des autres que dans la vision ordinaire, on peut donc les dire différenciées, et néanmoins elles sont indifférenciées parce que toujours intégrées au Soi. Comme tout repose dans l’unique Conscience, les choses ne se différencient pas d’elle, ni même les unes des autres du fait que la dualité qui oppose moi et non-moi n’est plus. Il faut en revenir à la comparaison du miroir dans lequel les reflets sont perçus distincts mais inséparables les uns des autres et indissociables de l’orbe du miroir.