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BLOG COUSIN PASCAL

Celui qui perçoit l'univers comme un amas d'écume en plein océan ambrosiaque de la Conscience,
c'est lui, en vérité, l'unique Siva.

Ksemaraja









Auto-commentaire à L'extraordinaire réalité de la sagesse souveraine de Patrul Rinpoché

Source : du livre Le vol du garouda compilé par Keith Dowman – éditions Almora

I. Introduction directe à la nature de l'esprit

Premièrement, j'expliquerai la façon de s'exposer à la vision qui doit nous être révélée. Il existe généralement de nombreuses façons de provoquer la vision, telles que de l'établir grâce à l'autorité scripturaire et la preuve logique, comme dans l'approche philosophique, ou après avoir été fermement établi dans la conscience explicative de la troisième initiation, en recevant l'introduction expérimentale à la conscience première de la quatrième initiation, qui est la méthode des tantras communs. Mais la méthode utilisée ici, la pratique établie de la lignée des siddha sans peur, consiste à recevoir l'introduction grâce à la dissolution de l'esprit conditionné.

Pour développer, pendant que les vagues brutales des projections de pensées illusoires persistent, le train des pensées discursives grossières, engendrées par les objets de perception, recouvrent le visage originel de l'esprit. Même si nous nous trouvions face à la nature de l'esprit, nous ne la reconnaîtrions pas. Ainsi, afin de permettre aux pensées grossières de s'installer dans leur clarté naturelle : « Gardez d'abord l'esprit détendu ».

Dans la mesure où l'esprit, laissé simplement sans contrainte, est lui-même la conscience première de la claire lumière, nous ne pouvons réaliser notre état naturel d'être à l'aide d'aucune technique artificielle. Afin que la conscience innée puisse se révéler d'elle-même : « Sans projection ni concentration, dépourvu de pensée discursive ».

Un débutant peut maintenir l'esprit dans son espace authentique d'absorption naturelle, mais il ne lui sera pas possible d'échapper au désir d'expériences telles que l'allégresse, la clarté, l'absence de pensée qui font partie de cette quiétude. C'est pourquoi : « Dans un espace d'ouverture détendue ».

Échappant au cocon de l'attachement à ces expériences illusoires de quiétude, dans le but de révéler l'état naturel du savoir nu tout pénétrant, « émettez fortement un PHAT ! faisant voler l'esprit en éclats ».

Il est d'une importance cruciale d'interrompre le flot des pensées discursives et de détruire toutes les pratiques de méditation consciencieusement structurées afin que la syllabe PHAT ! soit clairement prononcée, courte et tranchante : « vigoureusement, fort et court, Ci voilà ! ».

À cet instant, l'absence de présomption sur ce que serait l'esprit, et l'inexistence de tous les points de référence est la libération manifeste. Ainsi il n'y a « rien d'autre qu'émerveillement et illumination ».

Dans cet espace de l'état pur, dépourvu de toute objectivité, le savoir nu pénétrant tout, la conscience dissolvant l'esprit reste dans l'ici et maintenant. Ainsi : « Dans l'émerveillement de l'illumination se trouve l'omniprésente liberté de l'esprit ».

Par la suite, cette liberté d'esprit omniprésente est le cœur du sujet de la conscience immanente, inexprimable, qui transcende les extrêmes de la création et de la cessation, de l'existence et de la non-existence, et réside au-delà du champ de la parole et de la pensée. Ainsi : « cette omniprésente liberté de l'esprit est inexprimable ».

La signification cruciale de cette expérience est que la présence totale inhérente à la base de l'état pur est la vraie vision de la pureté première non élaborée, continuum de l'état naturel de l'esprit. Jusqu'à ce que nous reconnaissions la vision en tant que Savoir, et seulement cela, quelque soit la façon de laquelle nous essayerons de cultiver l'esprit grâce à la pratique de la méditation, nous resterons confinés à une vue artificielle et à une méditation structurée par l'intellect. Le processus de parfaite perfection naturelle étant plus distant que la terre du ciel, le cercle indispensable de la claire lumière de la non-méditation est absent. À cause de cette nécessité de reconnaître la présence totale dès le début, « Reconnaissez la présence totale unique de l'état pur ».

La substance de ce qui a été dit est le premier des trois préceptes oraux pénétrants. Si nous manquons l'introduction à la vision, il n'existe pas d'état à maintenir par la méditation, c'est la raison pour laquelle il est fondamental que la vision nous soit d'abord révélée. C'est la conscience immanente résidant en nous qui doit être révélée, rien ne peut être vu autre part et il n'y a rien à générer qui ne soit déjà là, dans la conscience. Ainsi: « Une introduction directe à la nature de l'esprit est le premier impératif ».


II. La conviction absolue

Je vais maintenant expliquer en détail comment la méditation est expérimentée. La méditation est un incessant flot existant de tout temps et en toute situation, dans la quiétude ou la fluidité, sans entraver ni privilégier l'un ou l'autre. Dans la quiétude réside le visage originel de l'état pur et dans la fluidité nous observons la créativité naturelle de la conscience première. Ainsi : « Que ce soit dans l'inactivité ou la fluidité ».

Peu importe ce qui est généré par l'ingéniosité des formes-pensées de notre esprit conditionné, que ce soit de l'émotion telle la colère ou le désir, en rapport avec la vérité de l'origine de la souffrance, ou des sentiments tels le bonheur et la tristesse, appartenant à la vérité de la souffrance, si nous percevons de telles pensées, sentiments et émotions tels qu'ils sont, tout est le libre jeu de l'état pur. Ainsi : « Le désir ou la colère, le bonheur ou la tristesse ».

Il se peut que nous ayons été introduits à la vision, mais si cet état n'est pas maintenu dans la méditation et que nous retombions dans les habitudes ordinaires de la pensée illusoire, nous serons attachés aux modèles cycliques de l'existence par le courant de la pensée incontrôlée. Quand le flot de la conscience s'est séparé de la modalité de la vision, il n'y a pas de distinction entre nous et n'importe quelle personne ordinaire dans l'illusion. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire de maintenir l'absorption involontaire de non-méditation : « En tout temps et en chaque situation ».

Peu importe, de cette façon, l'état dans lequel nous nous trouvons, il n'est pas nécessaire de refréner la moindre pensée et émotion par un antidote spécifique. Qu'il y ait quiétude ou fluidité, et peu importe quelle pensée ou émotion est générée, le remède universellement libérateur et ultime est contenu dans une seule intuition de la vision qui nous a été révélée. Ainsi : « En maintenant la reconnaissance directe de l'état pur ».

Plus encore, aucune pensée ou émotion de peut jamais échapper à la conscience première de l'état pur. Si nous reconnaissons la nature de n'importe quelle pensée ou émotion produite, nous reconnaissons ce qui est appelé la claire lumière du filon mère parce que la nature de cette pensée est la véritable claire lumière de la base de l'état pur. La vision de la claire lumière du savoir intrinsèque qui nous a été révélée précédemment par le lama et est reconnue maintenant de manière réflexive est appelée la claire lumière de la voie de la pratique. L'unification de la claire lumière de la base d'être avec la claire lumière de la voie est appelée la rencontre de la claire lumière de la mère et du fils. Ainsi : « La claire lumière intime du fils unie avec la lumière mère ».

En conséquence, en faisant constamment attention à la claire lumière de la vision reconnue de façon réflexive, il est d'une importance cruciale d'éviter de désamorcer complètement les pensées et les émotions qui sont l'expression de l'absorption dans cet état ou l'identification avec celui-ci. Ainsi : « Restez dans l'espace du savoir inexprimable ».

Lorsqu'un débutant maintient longtemps un tel état, les expériences illusoires telles l'exaltation, la clarté et l'absence de pensée obscurciront certainement le visage naturellement pur et originel de l'esprit. S'évader de ce cocon d'expériences illusoires consiste à révéler le visage nu de la présence totale, la conscience première brillant de l'intérieur. Quelqu'un a dit : « La descente escarpée augmente la férocité d'un ruisseau de montagne. Les perturbations améliorent la méditation du yogi ». Ainsi : «Encore et encore, faites voler en éclat l'exaltation et la clarté de la quiétude et de la fluidité ».

Il se peut que nous nous demandions comment la rupture, ou l'éclatement, doit-elle être entreprise ? Lorsque les expériences illusoires de la quiétude, de l'exaltation ou de la clarté se sont installées, ou lorsque les visions emplies de joie et agréables s'élèvent et s'intensifient, nous devons rompre immédiatement le cocon des expériences illusoires auxquelles nous sommes devenus attachés, avec une attaque éclair de la vigoureuse exclamation PHAT ! PHAT est une combinaison du glyphe des moyens habiles, PHA, le Collecteur, et le glyphe de la parfaite pensée intuitive profonde, TA, le Séparateur. Ainsi : « Émettez brusquement la syllabe des moyens et de la pensée intuitive profonde ».

Ainsi, en maintenant en tout temps et en toutes conditions le savoir inexprimable pénétrant tout qui réside au cœur de l'expérience méditative il n'est fait aucune distinction entre l'équilibre de la méditation formelle et celui de l'état d'esprit résultant qui est la méditation de la parfaite pensée intuitive profonde dans la vie quotidienne. Ainsi : « La méditation formelle et l'expérience du quotidien sont identiques ».

De même, il n'est pas fait de distinction entre la méditation qui est l'essence des sessions formelles, et la méditation sur les activités entre les sessions. Ainsi : « Les sessions de méditation et les intervalles entre elles sont indiscernables ».

Dans cette sublime méditation qu'est la non-méditation, dans l'ouverture naturelle de la conscience première qui est un courant incessant de l'état naturel, puisqu'il n'y a pas même la moindre ombre sur laquelle méditer, il ne peut pas même y avoir la moindre fraction de seconde de distraction. C'est le sens de la phrase, « Il n'y a pas de processus de méditation, et donc pas d'éloignement du droit chemin de celle-ci ! Comment est-il possible que nous puissions ne pas connaître la non-méditation ? » Ainsi : « Restez en permanence dans un état de non-différentiation ».

Pour ceux qui sont des réceptacles possédant une affinité innée pour la Grande Perfection naturelle, ceux qui atteignent la libération soudaine simplement en écoutant les instructions, toutes les apparitions sont toujours spontanément libérées dans la base de leur apparition, et tout ce qui apparaît est le libre jeu de l'état pur, là où il n'y a ni méditation ni méditant. Mais les autres, les individus moins fortunés bouleversés par les pensées illusoires, doivent suivre une voie progressive, cultivant la méditation jusqu'à ce qu'ils aient acquis la stabilité. Ainsi : « Alors que la stabilité est encore en développement »

Dans une telle méditation préliminaire, lorsque les circonstances qui génèrent l'absorption concentrée sont appropriées, l'expérience méditative apparaît, mais au beau milieu des distractions et des divertissements, quelle que soit la durée dont nous prolongeons notre méditation, aucune expérience méditative ne sera générée. Ainsi : « Renoncez aux divertissements et chérissez la méditation »

Dans la méditation il n'existe pas de différence entre l'équilibre de la méditation formelle et l'expérience de la pensée intuitive profonde dans la vie quotidienne. Mais si au départ nous n'avons pas réalisé la nature de l'absorption méditative, nous ne pourrons pas intégrer l'expérience méditative de la conscience première dans l'expérience post méditative. Nous pouvons nous efforcer d'amener le courant des activités quotidiennes sur la voie, mais nous continuerons d'être perdus dans nos mauvaises habitudes. Ainsi : « Asseyez-vous régulièrement dans une méditation formelle ».

Maintenant que la pratique est divisée en sessions et intervalles de méditation, nous pouvons nous fier à la concentration mentale qui maintient l'équilibre méditatif crucial pendant les sessions. Mais si nous ne pouvons le maintenir continuellement dans la vacuité de l'activité quotidienne entre les sessions après l'avoir intégré à l'aide de la pensée intuitive profonde, l'antidote sera inefficace et, écarté par des pensées contingentes, nous nous sentirons des êtres humains ordinaires. Il est donc impératif de maintenir une pensée intuitive profonde pénétrant tout entre les sessions : « En tous temps et en toutes situations ».

Il n'est jamais nécessaire d'utiliser une quelconque autre technique de méditation. Dans l'espace où l'équilibre méditatif est identique à la vision de l'état pur, chaque action et chaque pensée est à regarder sans calcul, les laissant simplement être, sans inhibition ni indulgence, avec une attitude telle que « ça va, ça vient ». Donc : « Observez le libre jeu de l'état pur et indivisible ».

Une telle pratique du caractère inséparable de l'introversion dans le calme de l'absorption et de l'extraversion dans la conscience élevée, le yoga du non élaboré, la pureté naturelle, consiste à regarder le visage originel de l'esprit, naturel et inné. C'est l'essence-même de chaque pratique des tantras Vajrayana du Guhyamantra. C'est la conscience première, réalité de la quatrième initiation. C'est le joyau spécial qui accomplit les souhaits de la lignée de méditation, et c'est l'objectif irréprochable de tous les adeptes, des lignées de l'Inde et du Tibet, et de tous les yogis des transmissions anciennes et nouvelles qui en ont acquis la maîtrise. Un esprit ouvert doit être ainsi convaincu de la validité et de l'efficacité de cette instruction. Si nous salivons encore sur des préceptes secrets complémentaires, nous devenons comme le gardien d'éléphant qui, ayant laissé son animal à la maison, le cherche dans la jungle : prisonniers d'une cage de constructions fictives, nous n'avons aucune possibilité de libération. L'engagement total dans notre pratique et la foi en son efficacité, sont essentiels, c'est pourquoi nous devons être : « Convaincus que rien d'autre n'existe ».

De cette façon, convaincu que la conscience immanente et nue de l'état pur est la bouddhéité non affectée par l'illusion, maintenez constamment le courant de la conscience première. C'est le second précepte incisif, d'une importance cruciale. Ainsi : « La conviction absolue est le deuxième impératif ».


III. La confiance implicite dans la Libération

Bien que le visage originel de l'esprit ait été révélé et que nous soyons convaincus que la bouddhéité est la conscience première de l'état pur, si maintenant nous manquons de confiance dans le processus de libération, la simple méditation d'un esprit tranquille et au repos nous confinera à une existence imperceptiblement déviante dans les royaumes élevés des dieux. Une telle méditation ne peut dominer les situations critiques du désir et de la colère, elle ne peut arrêter le flot des impulsions karmiquement conditionnées et ne peut faire basculer nos convictions vers la confiance. Ainsi le processus de libération est de la plus grande importance.

Que l'on possède un attachement acharné à un objet de désir ou une aversion acharnée à un objet de dégoût, ou qu'apparaissent les sentiments de plaisir causés par des circonstances favorables telles que l'acquisition de biens ou les sentiments de souffrance causés par des conditions négatives telle que la maladie, tout ce qui se passe à cet instant est la créativité de la présence totale, et la reconnaissance de la conscience première qui est la base de la libération est fondamentale. Ainsi : « En cas de désir ou de colère, de joie ou de tristesse ».

Qui plus est, si dès le début notre pratique manque le processus essentiel de libération, chaque réflexion produite par les processus mentaux subconscients renforcera les modèles de comportement cycliques. C'est la raison pour laquelle, quelles que soient les pensées produites, grossières ou subtiles, il est essentiel d'observer leur libération dès le commencement afin qu'aucune trace ne perdure. Ainsi : « Ou lors de n'importe quelle pensée fugace ».

Grâce à ce processus les pensées ne peuvent devenir des suppositions, subconscientes et illusoires, sur la nature de la réalité ou des idées intellectuelles figées. Immergée dans l'espace de l'attention inhérente et naturelle, reconnaissant de manière réflexive le visage originel de n'importe quelle pensée apparaissant, la pensée est libérée dès son origine et il ne reste aucun résidu dans l'esprit. Gardez cet état dans lequel les pensées se dissolvent instantanément, comme une silhouette dessinée sur l'eau, afin que : « Avec la reconnaissance directe aucune trace ne subsiste ».

Si à ce moment les pensées ne se dissolvent pas dans la libération réflexive et que la simple reconnaissance des formes-pensées n'interrompt pas l'activité illusoire, regardez directement l'essence vide au moment de la reconnaissance. Ainsi, en restant dans l'intuition de la conscience première avec laquelle nous sommes familiarisés, les pensées se dissolvent sans trace. Puisque ce processus est d'une importance capitale : « Ayant compris intuitivement l'aspect libérateur de l'état pur ».

Lorsque la génération de pensées et leur libération sont simultanées, identiques à la simultanéité du dessin d'une silhouette sur l'eau et de sa disparition, maintenant vous la voyez et maintenant vous ne la voyez plus, il y a apparition et libération réflexive sans interruption. Ainsi : « Telle une silhouette dessinée sur l'eau ».

Donc, évitez d'interférer quelle que soit l'apparition qui émerge, autorisez quoi qu'il se manifeste à apparaître naturellement, considérez le cœur de la pratique comme un processus constant de dissolution dans la condition naturellement pure de tout ce qui apparaît, et ainsi : « Apparition spontanée et libération réflexive sont incessantes ».

Par conséquent, puisque la pensée est la potentialisation créative de l'état pur, quelle que soit la forme-pensée qui apparaisse, celle-ci se produit pour rendre potentiel la présence totale, et dans la mesure où les pensées grossières attachées aux cinq poisons (désir, haine, orgueil, jalousie et paresse) sont produites, la présence totale de la libération est chargée d'énergie et de rayonnement. Ainsi : « Quoi qu'il apparaisse nourrit le savoir vide et nu ».

Lorsque chaque pensée qui se déplace, qui se produit en tant que créativité spontanée dans la présence totale toute-pénétrante, est regardée sans acceptation ou rejet, et est libérée dès son origine, elle ne peut être autre que le libre jeu de l'état pur. Ainsi : « Quoi qui se déplace est la créativité souveraine de l'état pur ».

Les concepts mentaux, les formes de l'ignorance et de l'illusion, sont purifiés dans la Matrice omniprésente de l'état pur, en tant que présence totale et conscience première. Tous les mouvements de pensées engendrés dans la Matrice omniprésente de la claire lumière incessante sont vides dans leur nature originelle. Ainsi : « C'est la pureté naturelle dépourvue de trace, stupéfiant ! »

Après une intimité prolongée avec la pratique constante de purification et de dissolution, les pensées apparaissent en tant que méditation. La distinction entre la quiétude et le mouvement est hors de propos et rien de ce qui apparaît ne dérange la sérénité de base. C'est pourquoi : « La façon d'apparaître est la même qu'auparavant ».

La façon par laquelle la pensée potentialise maintenant les joies et les peines, les espoirs et les peurs, est la même que pour les êtres ordinaires. Mais alors que la personne ordinaire, pour qui l'inhibition et la complaisance, l'affirmation et la négation apparaissent compulsivement, se conditionne à un comportement karmiquement schématisé et est dominée par le désir et la colère, le yogi pour qui les pensées sont libérées dès leur origine est doté du processus fondamental de libération. Initialement les pensées sont libérées par leur reconnaissance, comme lorsqu'on rencontre un vieil ami. Au fur et à mesure du développement de la pratique, les pensées se libèrent réflexivement comme un serpent dénouant ses nœuds et, finalement, les pensées sont libérées sans dommage ni avantage, comme un voleur pénétrant dans une maison vide. D'où : « La différence cruciale réside dans la libération ».

Pour cette raison il est dit : « Connaître la méditation mais pas la libération, n'est-ce pas la transe divine des dieux ? » Si nous plaçons notre confiance dans la simple absorption concentrée d'un esprit au repos, une technique de méditation qui ne possède pas la dynamique de libération, nous nous égarons dans des états élevés de transe. Croire qu'il suffit de reconnaître l'aspect de repos et de mouvement en tant que tels n'est pas différent de la pensée confuse ordinaire, et bien que nos esprits soient imprégnés de concepts intellectuels tels que la vacuité et état pur, lorsque nous sommes confrontés à des circonstances défavorables, l'inadaptation de notre remède est mise à nu, et notre capacité naturelle se retrouve entrain de désirer. Ainsi : « En l'absence de ce point crucial, la méditation est une illusion ».

Libération dès l'origine, auto-libération, libération directe, appelez la comme vous voulez, la fonction de libération par laquelle la pensée est dissoute par elle-même, ne laissant aucune trace, est l'essentiel de la libération spontanée directe qui est l'extraordinaire réalité et la caractéristique unique de la Grande Perfection naturelle. Si cette fonction cruciale est opérative, quelle que soit la pensée ou l'émotion produite, celle-ci se manifeste en tant qu'état pur, les constructions illusoires se dissolvent dans la conscience première, les circonstances défavorables émergent comme des aides amicales et l'émotion devient la voie elle-même. Dans la mesure où le samsara est intrinsèquement pur, en ne rejetant aucune des dimensions violentes ou plaisantes à travers lesquelles la conscience migre, nous sommes libérés des chaînes de l'attachement à toutes les possibilités d'existence et à tous les états paisibles. En ne faisant absolument rien, dépourvu d'effort, nous passons à travers. C'est pourquoi « En le possédant, c'est la non-méditation de l'état pur ».

Si à la base nous manquons de conviction dans le processus de libération, nous pouvons nous vanter que notre flot spirituel possède la vision la plus haute et la plus exceptionnelle ainsi que la méditation la plus profonde, mais puisque notre esprit n'en bénéficie pas et que ce n'est pas un antidote à l'émotion, nous nous sommes éloignés de la voie de la pureté intrinsèque. Toutefois, lorsque la fonction cruciale de la libération réflexive des pensées apparaissant spontanément est opérative, nous pouvons bien ne pas posséder la moindre trace d'une vue hautement philosophique, ni même trouver le moindre refuge dans la méditation profonde, il est inévitable que nous soyons libérés de l'esclavage de la structure duelle de notre flux de pensée. En atteignant une île faite d'or, même si nous cherchons partout, il est impossible de trouver de la terre et des pierres ordinaires. De la même façon, lorsque le repos et le mouvement, ainsi que chaque pensée produite apparaissent en tant que méditation (la combinaison de la vacuité et de la compassion), même si nous cherchons des projections illusoires spécifiques, nous ne les trouverons pas. Puisque la confiance dans le processus de libération est directement proportionnel à notre capacité de toucher le cœur de la pratique existentielle : « La confiance implicite dans la libération est le troisième impératif ».